LA PROTECTION DU CONTRIBUABLE A TRAVERS LA CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L’HOMME : UNE NOUVELLE CONSIDERATION DES DROITS DE LA DEFENSE ?

 


 

par Thibauld MASSON, Doctorant en droit européen à la Faculté de droit de Nice Sophia-antipolis,
Article publié dans la Revue « Fiscalité Européenne et Droit International des Affaires » N° 131
(Année 2002)


 

 

La finalité première de la Convention européenne des droits de l’homme du 4 novembre 1950 demeure avant tout la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

À ce titre, la protection conventionnelle n’exclut pas pour autant la protection des droits économiques même si les dispositions qui les garantissent expressément et directement sont rares.

Pourtant existe-t-il des droits et des libertés dont l’exercice n’implique ou n’entraîne des incidences économiques ?

Bien sûr, la technique de protection diffère selon que les droits garantis sont civils et politiques, ou économiques, voire fiscaux.

Ainsi, la Cour européenne des droits de l’homme se trouve fréquemment saisie par les particuliers des États membres du Conseil de l’Europe pour sanctionner des violations de la convention européenne des droits de l’homme touchant à la matière fiscale.

Appréhendée alors au travers du prisme des droits fondamentaux du texte conventionnel, et plus précisément de son article 6, la fiscalité trouve, désormais, un champ d’application dans le droit européen des droits de l’homme (1).

Expression de la souveraineté des États et menace constante pour les droits et libertés des citoyens, la fiscalité pourrait désormais être soumise à l’examen de la Cour européenne des droits de l’homme, voire être directement remise en question devant les juridictions nationales sur le seul fondement de la Convention.

Les rédacteurs, dans le texte initial, n’avaient pas envisagé que la fiscalité entrerait un jour dans son champ d’action, et ferait de la Cour européenne des droits de l’homme, l’instrument d’un contrôle des administrations fiscales nationales et, à travers elle, des lois et règlements pris en matière d’impôt.

Si le texte conventionnel fait référence à la fiscalité, par son premier protocole additionnel de 1952, c’est pour consacrer comme limitation au droit au respect des biens, « le droit que possèdent les États de mettre en vigueur les lois qu’ils jugent nécessaires pour assurer le paiement des impôts ».

Il n’est pas étonnant alors, que la fiscalité occupe une place extrêmement restreinte, jusqu’au début des années 90 dans les commentaires des auteurs spécialistes de la protection européenne des Droits de l’Homme et que les études consacrées entre fiscalité et protection Conventionnelle soient peu nombreuses.

En France, par exemple, ce n’est que depuis environ dix ans que les contribuables et leurs conseils semblent porter un certain intérêt à la Convention, dont les dispositions substantielles revêtent un effet direct dans l’ordre juridique français, mais dont l’application d’office par le juge ne semble pas encore définitivement acquise (2).

Les requêtes fondées sur la Convention dont les juridictions fiscales françaises ont eu à connaître à ce jour sont peut-être tout aussi nombreuses que celles qu’a eu à connaître la Commission européenne des droits de l’homme, en son temps.

Rien en droit strict n’oblige le juge français à adhérer aux constructions jurisprudentielles de la cour européenne de Strasbourg. Cependant, il importe, pour reprendre les termes du Commissaire du gouvernement Ronny Abraham : « dés lors que la France a reconnu le droit de recours individuel devant les organes de Strasbourg (3), que le juge national, ne s’en tienne pas à l’exercice d’un contrôle moindre que celui des juges européens sur des questions analogues » (4).

Il apparaît alors que la prise en considération de la protection des intérêts fiscaux est susceptible d’avoir des effets induits profitables à la garantie des droits de la personne humaine.

Considérée sous l’angle du droit fiscal, la Convention européenne des droits de l’homme n’apparaît de prime abord que comme une norme de référence particulièrement secondaire.

Textuellement, qu’une seule liberté économique pouvant être liée aux activités fiscales, celle du respect des biens, n’est encore qu’un travers, un libellé susceptible de légitimer les ingérences étatiques.

Et pourtant, à l’instar du droit des affaires, l’invocation de la Convention européenne des droits de l’homme dans le cadre des contentieux du droit fiscal est en train de revêtir une importance croissante, affectant un ensemble de matières qui traditionnellement étaient constitutives de la souveraineté des États.

Ainsi les contribuables soutiennent-ils très fréquemment devant les juges de l’impôt un ou plusieurs moyens tirés de la violation prétendue des dispositions de la Convention ou de ses protocoles additionnels (5).

Le moyen paraît cependant être rejeté sans examen « lorsqu’il n’est pas assorti de précisions permettant d’en apprécier la portée » (6), ou « lorsque le contribuable ne précise pas les dispositions et principes qu’il entend invoquer et ne permet pas ainsi au juge d’apprécier la pertinence de ce moyen (7).

Ce moyen qui, en toute logique, s’il est sans rapport avec le contenu des stipulations de la Convention invoquées par le contribuable, reste et demeure inopérant.

C’est ainsi le cas où, par exemple, la mention des textes applicables dans une notification de redressement constituerait une violation des dispositions de l’article 10, paragraphe 1 et 2, de la Convention (8).

Il peut également arriver que le juge écarte le moyen en considérant simplement que la Convention ne contient aucune stipulation qui puisse être regardée comme ayant abrogé la disposition incriminée du CGI, telle que celle de l’article 197 prévoyant une réduction d’impôt sur le revenu dans le département de la Guyane (9).

Il apparaît alors que le déficit des droits de la défense en droit fiscal, et plus particulièrement dans les procédures fiscales, a nécessité cette nouvelle prise en compte du droit européen des droits de l’homme.

Un déséquilibre flagrant existe entre les pouvoirs de l’Administration et les garanties offertes aux contribuables (10), en particulier lors de la mise en oeuvre de la taxation d’office et celui des conséquences attachées à la saisine de certains organismes à caractère consultatif.

À titre d’exemple, les conséquences de la mise en oeuvre de la taxation d’office sont particulièrement préjudiciables pour le contribuable car, en premier lieu, celle-ci renverse la charge de la preuve. C’est au contribuable taxé d’office d’apporter la preuve de l’exagération de la taxation administrative. En second lieu, le contribuable n’a pas le droit de saisir la commission départementale, et enfin, les vices de procédure dont s’est rendue coupable l’Administration, sont sans effet, alors qu’ils entraînent la nullité de la procédure pour un contribuable taxé selon la procédure contradictoire.

Il est donc privé de toute garantie.

C’est sans doute pourquoi, depuis environ dix ans, le droit fiscal a été saisi de façon de plus en plus visible par la Convention européenne des droits de l’homme, bien que ce soit, beaucoup plus, le droit des procédures fiscales qui ait été le plus affecté que le régime des impositions (11).

En effet, les droits substantiels garantis par la Convention n’ont toujours pas, en l’état de la jurisprudence européenne, exercé une influence majeure, bien que cette dernière soit en constante évolution (12), ne serait-ce, sans doute, que parce que la marge d’appréciation reconnue en la matière aux États demeure importante (13).

Toutefois, il est possible d’imaginer qu’une interprétation plus exigeante du principe de non-discrimination inscrit à l’article 14 ou, du droit au respect des biens consacré à l’article 1 du Protocole numéro 1 sont de nature à susciter un nombre croissant d’allégations et, le cas échéant, de constats d’inconditionnalité dans le domaine du droit fiscal matériel.

Pourtant, le véritable centre de gravité de l’intervention du droit européen des droits de l’homme en matière de fiscalité demeure l’assujettissement au droit de la Convention, et en premier lieu, au chef de garantie du procès équitable, de la répression fiscale administrative.

C’est ainsi que dans les dispositions qui peuvent êtres invoquées, une place de choix doit être réservée aux dispositions de l’article 6.

Celui-ci consacre ce que nous pourrions appeler depuis que la formule a été consacrée par la Cour européenne dans son arrêt Golder (14), « le droit à un procès équitable « .

Jusqu’à la fin des années quatre-vingt, l’ancienne Commission européenne des droits de l’homme a considéré que l’article 6 n’était pas applicable à l’ensemble des procédures de taxation fiscale ou de recouvrement en raison de son champ d’application limité aux contestations portant, d’une part, sur la détermination des droits et obligations de caractère civil » et, d’autre part, sur le bien fondé d’une accusation pénale.

Or depuis environ dix ans, une inflexion majeure de la jurisprudence européenne se constate en ce qui concerne les droits et obligations de caractère civil et la notion d’accusation en matière pénale. 

L’ASSUJETTISSEMENT DU DROIT FISCAL
AUX DISPOSITIONS DE LA CONVENTION
 

Ainsi l’assujettissement des pénalités fiscales aux exigences de la CEDH a été envisagé sous l’angle privilégié de l’article 6.

L’EVOLUTION DE L’AUTONOMIE DE LA PROTECTION

Il est intervenu au terme d’une succession de changements et d’orientation de l’ancienne Commission européenne (15). L’assimilation des sanctions fiscales à des « accusations en matière pénale » au sens de l’article 6 (16) de la convention sera solennellement entérinée par la Cour européenne dans le cas du désormais célèbre arrêt Bendenoun (17).

À partir du moment où les sanctions fiscales sont de la sorte « pénalisées », l’intérêt de l’invocation de la Convention va dépasser le cadre des garanties du droit à un procès équitable, l’appel aux protections d’ordre pénal consacré par d’autres dispositions du texte conventionnel, devient alors concevable.

Pourtant l’application de ces principes reste encore un domaine où se confrontent jurisprudences européenne et nationale, judiciaire et administrative.

Ainsi le Conseil d’État a déjà eu l’occasion d’affirmer que le droit au respect des biens reconnus à toute personne physique ou morale par l’article premier du premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales ne porte pas atteinte au droit de chaque État parti au protocole de mettre en oeuvre les lois qu’il juge nécessaires pour assurer le paiement des impôts (18).

A la différence du moyen tiré de la méconnaissance de l’article 6-1 de la convention européenne des droits de l’homme relatif aux exigences d’un procès équitable en matière civile et pénale, qui est jugé inopérant en matière civile et fiscale soit parce qu’il ne s’applique qu’aux procédures contentieuses suivies devant une juridiction (19), soit parce qu’il ne soumet pas à une juridiction des contestations en matière civile ou pénale (20), le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l’article 1 du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme n’est pas écarté comme inopérant mais fait l’objet d’une réponse au cas par cas par le Conseil d’État.

Le conseil d’Etat, la Cour de Cassation et les juges européens ont adopté des positions différentes sur l’applicabilité et la prévalence de ces dispositions.

Pour le Conseil d’État le principe semble que les dispositions de l’article 6-1, ne sont pas applicables en matière fiscale. Il est fondé sur la lettre même de ces dispositions: « le juge de l’impôt ne statue pas en matière pénale et ne tranche pas de contestations sur les droits et obligations de caractère civil » (21).

Dans certains arrêts, le Conseil d’État tire de ces constatations la conséquence suivante: « dés lors, les dispositions précitées de l’article 6-1… ne sont pas applicables aux procédures relatives aux taxations fiscales « , cette formule évoquant celle qui est utilisée dans les décisions du juge de Strasbourg (22).

Le Conseil d’État a pu utiliser parfois d’autres formules. Il commence par définir de manière positive le champ d’application des dispositions de l’article 6-1: « ces dispositions sont applicables aux seules procédures contentieuses suivies devant les juges statuant en matière pénale ou tranchant des contestations sur des droits ou obligations de caractère civil », pour constater encore, que l’office du juge de l’impôt n’est pas de statuer en matière pénale ni sur les droits et obligations de caractère civil.

Cette formule ne prend pas seulement en compte la nature des droits et obligations contestés. Elle met en évidence deux autres conditions d’application du texte.

Les dispositions de l’article 6-1 ne peuvent recevoir application dans les procédures non contentieuses, telles les procédures administratives d’établissement et de recouvrement de l’impôt. Elles ne sont pas applicables, non plus, aux procédures contentieuses suivies devant les administrations fiscales, telle la procédure de la réclamation préalable en matière d’assiette de l’impôt ou celle de la demande préalable en matière de recouvrement.

Il arrive d’ailleurs au Conseil d’État qu’il s’en tienne à cette dernière formule : « il résulte clairement de ces dispositions qu’elles sont inapplicables aux procédures de taxations fiscales » (23).

La jurisprudence est constante. Les stipulations de l’article 6 ne sont applicables ni aux procédures d’établissement de l’impôt, ni aux procédures de recouvrement, ni aux dispositions relatives à la charge de la preuve, ni aux procédures contentieuses suivies devant l’Administration, ni aux procédures juridictionnelles.

Néanmoins, la Cour de Cassation (chambre commerciale et financière) considère, au contraire du Conseil d’État, que les stipulations de l’article 6-1 sont susceptibles de recevoir application en matière fiscale.

Elle a admis alors que cette solution pouvait être appliquée en ce qui concerne la procédure contentieuse du recouvrement de l’impôt et plus exactement, la règle prévue à l’article R. 281-5 du LPF. Elle a ainsi pu juger qu’une Cour avait fait « une exacte application » de l’article 6 en refusant d’accueillir un moyen de droit nouveau qui n’avait pas été soumis à l’administration du Trésor, dans la demande préalable (24).

La Cour de Cassation a confirmé ultérieurement sa jurisprudence sur l’applicabilité des dispositions de l’article 6-1 en matière fiscale pour la taxation d’office des droits d’enregistrement (25).

De même, la Cour a défini ultérieurement sa position dans l’arrêt d’Assemblée plénière du 14 juin 1996, Kloener (26), en des termes qui ne peuvent laisser aucun doute sur la volonté de faire entrer les litiges de droit fiscal dans le champ d’application de l’article 6-1.

Il y est clairement affirmé que « le droit de toute personne à un procès équitable, garanti par l’article 6-1 peut être invoqué devant toute juridiction civile statuant en matière fiscale ».

Pour les instances européennes, force est de rappeler que l’ancienne Commission européenne des droits de l’homme a pu considérer que l’article 6-1 de la convention est inapplicable aux « procédures de taxations fiscales » ; sa jurisprudence a toujours été constante (27).

La Cour européenne des droits de l’homme a pu préciser que l’article 6-1 n’est pas applicable aux contestations ressortissant exclusivement au domaine du droit public et notamment aux procédures fiscales en tant que telles, puisque celle-ci n’ont pas trait à des contestations sur des droits et obligations de caractère civil.

Par ailleurs, et hormis les amendes imposées à titre de « sanction pénale », le fait de démontrer qu’un litige est de nature « patrimoniale », n’est pas suffisant pour qu’il soit couvert par la notion de « droit et obligations de caractère civil », notamment lorsque l’obligation qui est de nature patrimoniale résulte d’une législation fiscale (28)

Cependant les instances européennes ont admis, pendant longtemps, que certains litiges détachables des opérations de « taxations fiscales » peuvent mettre en cause la notion  » de droits et obligation de caractère civil » au sens de l’article 6-1 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Tous les articles, ou presque de la Convention, en ont fait vocation à s’appliquer à la fiscalité, si l’on veut bien leur donner la portée qu’ils méritent, sachant qu’un certain nombre s’y appliqueront plus aisément en raison de leur relation plus intime avec les matières économiques.

La jurisprudence de Strasbourg, comme celles des juridictions internes, révèlent que parmi, les principaux articles invoqués, seul l’article 6 se heurte à de véritables difficultés d’application .

L’enjeu est de taille dans la mesure où, parmi les droits protégés, le procès équitable couvre un nombre d’hypothèses particulièrement important et est par conséquent à l’origine de l’essentiel des contestations fondées sur la convention européenne.

Le principal obstacle à la mise en oeuvre de l’article 6 tient à la définition de son champ matériel d’application (29).

Les notions de « droits et obligations de caractère civil « et « d’accusation en matière pénale » ne font l’objet d’aucune définition dans le texte de la Convention.

Nous pourrions nous en tenir à une interprétation littérale de l’article 6 aux seuls droits civils et pénaux, ce qui conduirait implicitement à interpréter ses dispositions par référence au droit interne de l’État concerné.

La jurisprudence de la Cour a tendu au contraire à analyser de manière autonome ces notions par rapport au droit interne de l’État défendeur, autonomie affirmée dans divers arrêts dont la décision Ringeisen (30).

L’avantage de cette interprétation a été particulièrement bien mis en lumière par la doctrine, et ainsi, détachées de leur contexte juridique national et dotée d’un sens « européen », les notions autonomes permettent à la Cour d’élaborer une définition uniforme des engagements étatiques et, ainsi, de préserver l’égalité de traitement entre les États contractants sous réserve, toutefois, que les juridictions internes, qui sont chargées au premier chef d’appliquer la Convention, procèdent à une lecture similaire de l’article 6-1(31).

Ainsi, au sens conventionnel du terme, un droit peut être considéré comme étant de caractère « civil » par rapport au contenu matériel et aux effets que lui confère le droit interne et non au regard de la qualification effectuée par ce droit.

Mais le droit fiscal pourrait-il alors être considéré comme un droit dont le contenu matériel et les effets sont déterminants pour des droits et obligations de caractère privé, du moins en ce qui concerne le principal de l’impôt, soit la dette fiscale et toutes les procédures qui en découlent ?

La fiscalité a échappé pendant longtemps à la juridiction de la Cour européenne des droits de l’homme, en particulier, lorsque les requérants fondaient leur argumentation sur l’article 6 de la convention.

La commission, fidèle à son rôle de « chambre des requêtes », opposait en effet quasi-systématiquement une irrecevabilité de principes, affirmant avec force que « l’article 6 n’est pas applicable aux procédures fiscales » conformément à la jurisprudence constante sur ce point (32).

La Cour a donc du signifier à la Commission qu’elle entendait bien faire remonter jusqu’à elle les contentieux de nature fiscale et que le droit de la Convention devait évoluer sur ce point.

Le moyen lui en a été fourni par l’arrêt Darby (33) dans lequel la Cour européenne n’a pas estimé nécessaire de se prononcer sur la conventionnalité de l’article 9 comme le lui demandait le requérant et a choisi de se fonder sur l’article 14 combiné avec l’article 1 du premier Protocole additionnel, pour sanctionner la différence non légitime de traitements entre résidents.

Comme l’expliquait J-F Flauss: « la Cour n’est sans doute pas mécontente de montrer à la Commission qu’elle est en mesure d’ouvrir la voie à un contrôle européen du principe d’égalité par les législations fiscales nationales (34).

LA MISE EN Å’UVRE DE LA QUALIFICATION EUROPEENNE DANS LA PROTECTION DES DROITS PROCESSUELS

Pour étendre le champ d’application de l’article 6 au contentieux fiscal, la Cour dispose désormais de deux fondements possibles : « les droits et obligations de caractère civil » et les accusations en « matière pénale ».

Les instances européennes ont désormais admis que certains litiges sont « détachables » des opérations de « taxations fiscales » pouvant mettre en cause la notion de droits et « obligations de caractère civil ». Cependant, l’actualité jurisprudentielle aurait tendance à remettre en cause ce principe.

L’arrêt fondateur sur ce thème, Périscope c/France (35), a démontré que l’action en responsabilité formée par une société française contre l’État français, en réparation du dommage que lui aurait causé le refus de bénéficier d’avantages fiscaux et d’allègements de tarifs postaux, a un objet « patrimonial », et se fonde sur une atteinte à des droits, eux aussi, patrimoniaux.

Elle a admis également, que le droit de préemption pris par l’Administration des impôts d’exercer le droit de préemption prévu à l’article 668 du CGI, met en cause des « droits et obligations de caractère civil » et le droit de toute personne « au respect de ses biens », et qu’en l’espèce, il y avait eu violation de l’article 6-1 de la Convention faute de procès équitable et de l’article 1 du premier Protocole additionnel (36).

Les décisions des instances européennes dans l’affaire Hentrich ne peuvent cependant être considérées comme une avancée significative dans le domaine de la fiscalité, même si le droit de préemption faisait l’objet de dispositions incluses dans le CGI (article 6678) puis dans le LPF (article l. 18), avant sa suppression par la loi de finance pour 1997.

La Cour a pu reconnaître de même que l’article 6-1 est applicable aux actions juridictionnelles intentées pour obtenir la restitution d’impôts qui ont été versés en application d’un règlement qui ultérieurement, a été reconnu irrégulier par une décision de justice, mais a fait l’objet d’une loi rétroactive par le Parlement considérant que ces requêtes sont des actions de droit privé portant sur des biens, au sens de l’article 1 du premier Protocole additionnel, même si elles trouvent leur origine dans la législation fiscale (37)

Ce qui fait que, pour la reconnaissance du caractère civil, au sens de la Convention, de certains contentieux fiscaux, la Cour européenne reconnaissait que la contestation doit avoir un « objet patrimonial », à savoir un droit à indemnité, et qu’elle se fonde sur une atteinte alléguée à « des droits eux aussi patrimoniaux » auxquels sont assimilés les avantages fiscaux.

La contestation pouvait en conséquence être regardée comme portant sur des droits de caractère civil au sens de l’article 6-1 de la Convention.

Selon J-F Flauss: « une telle jurisprudence, illustration classique du principe de l’autonomie des qualifications, est de nature à perturber l’ordonnancement des deux théories traditionnelles de notre droit administratif, celle de la liaison de la compétence et du fond, celle des blocs de compétence en matière juridictionnelle (38).

Cependant un arrêt du 12 juillet 2001 de la Grande Chambre de la Cour européenne des droits de l’homme (39), revêtant des allures de solution de principe, a toutes les raisons de retenir l’attention dans ce contexte.

A propos de l’applicabilité de l’article 6 §1 de la Convention européenne des droits de l’homme, il consacre une solution qui vient déjouer les pronostics sur les possibilités d’application de la CEDH à la matière fiscale.

Les espoirs placés dans l’innovation des dispositions de l’article 6 §1 de la Convention européenne selon lesquelles « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (…) dans un délai raisonnable, par un tribunal (…) qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle », n’ont cessé d’enfler dans un passé récent. Or la seule question de l’applicabilité à la matière fiscale de ces stipulations a été le sujet de nombreuses hésitations. Alors que leur versant pénal a été amplement délimité, leur versant civil demeurait une source d’hésitation dans la jurisprudence de la Cour européenne.

Le doute est désormais levé avec l’arrêt Ferrazini.

Pourtant, il est vrai qu’une interprétation souple de la Convention a paru s’imposer à la faveur de l’assimilation croissante des litiges touchant aux droits patrimoniaux des citoyens, à des « contestations sur des droits de caractère civil », quelle que soit la branche du droit considérée à l’origine.

Une nuance fut cependant apportée à cette évolution lorsque la CEDH a dégagé l’idée que le fait de démontrer qu’un litige est de nature « patrimoniale » n’est pas suffisant pour, à lui seul, entraîner l’applicabilité de l’article 6 §1 sous son aspect civil (40).

Un lien a ainsi paru se tisser avec une jurisprudence qui avait précisément fait la réserve des obligations de nature patrimoniale résultant d’une législation fiscale ou des obligations civiques normales dans une société démocratique, sinon de manière directe, au moins par un simple obiter dictum (41).

Dans l’attente d’une prise de position de la Cour, l’état de la jurisprudence européenne restait donc incertain quant à l’applicabilité à la matière fiscale du versant civil de l’article 6 §1.

Ainsi dans l’arrêt Ferrazini, la Cour juge que « la matière fiscale ressortit encore du noyau dur des prérogatives des puissances publiques, le caractère public du rapport entre le contribuable et la collectivité restant prédominant ».

Sans lui accorder une importance décisive, elle prend en outre en considération la réserve explicite de l’article 1er du premier protocole quant à la matière fiscale, en s’appuyant sur l’idée que « la Convention et ses premiers protocoles quant à la matière fiscale échappent au champ des droits et obligations de caractère civil, en dépit des effets patrimoniaux qu’il a nécessairement quant à la situation des contribuables ».

Il a alors été jugé que l’invocation de l’atteinte aux intérêts patrimoniaux est sans incidence sur le fait que le versant de l’article 6 §1 est sans application aux contentieux fiscaux.

Autrement dit, l’avenir de la jurisprudence par laquelle le juge judiciaire avait admis que « le droit de toute personne à un procès équitable, garanti par l’article 6 §1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, peut être invoqué devant toute juridiction statuant en matière fiscale », paraît aujourd’hui très sérieusement compromis (42).

Cette analyse ne résiste guère au rapprochement des termes des arrêts « National and Provincial Building Society » et « Ferrazini ».

Il ressort des termes du premier que la cour a admis l’applicabilité de l’article 6 §1 en relevant le caractère de droit privé des actions en restitutions d’entreprises. La logique veut qu’au contraire, dans le cadre d’une instance fiscale ordinaire, la solution de l’arrêt Ferrazini, selon laquelle ces mêmes stipulations ne peuvent être invoquées, prévaille.

Au final, se trouvent donc désormais la jurisprudence constante du Conseil d’Etat en la matière, à laquelle il a été parfois reproché un certain attentisme, mais dont le caractère raisonnable ne manquera pas d’apparaître rétrospectivement, et la même concordance avec la jurisprudence européenne qui ne fait désormais plus de doute au sujet de l’inapplicabilité de ces stipulations dans les litiges de recouvrement.

C’est alors sous la notion « d’accusation en matière pénale », qu’aujourd’hui le principal facteur de soumission de la fiscalité au contrôle de la Convention, a pu être mis en Å“uvre.

Bénéficiant elle aussi d’une définition autonome, elle permet d’éviter à la Cour européenne que lui échappent des règles de droit répressif par leur objet, bien que formellement non pénales.

L’assujettissement des pénalités fiscales aux exigences la CEDH a été envisagée à titre privilégié sous l’angle de l’article 6, au même titre que « les droits et obligations de matière civile ».

Il est cependant intervenu au terme d’une succession de changement d’orientation de la Commission européenne des droits de l’homme (43) qui franchira le pas décisif en 1992 (44).

L’assimilation des sanctions fiscales à des « accusations en matière en matière pénale » au sens de l’article 6 (45) de la Convention sera solennellement entérinée par la Cour européenne dans le cadre de l’arrêt Bendenoun (46).

À partir du moment où les sanctions fiscales sont de la sorte « pénalisées », l’intérêt de l’invocation de la CEDH va dépasser le cadre des simples garanties du droit à un procès équitable.

La Cour européenne des droits de l’homme avait déjà une jurisprudence selon laquelle les sanctions fiscales peuvent être considérées comme ressortissant sous certaines conditions, à la matière pénale et « qu’il s’ensuit que l’article 6 trouve à s’appliquer en la matière (47).

Elle a admis ultérieurement que la majoration pour mauvaise foi, prévue à l’article 1729 du CGI est « une sanction qui, par son degré de gravité, ressortit à la matière pénale » et « qu’il s’ensuit que l’article 6 trouve à s’appliquer en la matière » (48).

Confirmant alors cette interprétation dans l’arrêt Bendenoun, la majoration d’impôt prévue en cas de mauvaise foi par l’article 1729 du CGI est assimilable à une « accusation en matière pénale » au sens de l’article 6 (49).

La Cour européenne a alors retenu trois facteurs pour reconnaître un caractère pénal à l’accusation que comporte l’application de la majoration pour mauvaise foi prévue à l’article 1729-1 du CGI.

En premier lieu cet article concerne « tous les citoyens en leur qualité de contribuables, et non un groupe déterminé doté d’un statut particulier; il leur prescrit un certain comportement et assortit cette exigence d’une sanction ».

La Cour entend ainsi distinguer les sanctions pénales des sanction disciplinaires (50).

En deuxième lieu, les majorations d’impôts « ne tendent pas à la réparation pécuniaire d’un préjudice », mais visent pour l’essentiel  » à punir pour empêcher la réitération d’agissements semblables ».

En troisième lieu, elles se fondent sur « une norme de caractère général dont le but est à la fois préventif et répressif ».

Mais les principes du procès équitable offert comme moyen de défense au contribuable n’est pas extensible et ne pourra être appliqué que dans certaines conditions.

Ainsi, ceux-ci ne peuvent s’appliquer devant la Commission des infractions fiscales, qui n’est pas un premier degré de juridiction mais un organisme consultatif destiné à donner son avis au ministre chargé des finances sur l’opportunité des poursuites (51).

La Cour a pu relever enfin qu’aux cas particuliers « les sanctions revêtaient en l’occurrence une ampleur considérable  » (52).

Ainsi, d’abord développé, à propos des sanctions disciplinaires militaires (53), puis étendu aux sanctions administratives (54), le raisonnement de la Cour européenne s’articule en deux propositions. D’une part, la Cour admet que « la Convention permet sans aucun doute aux États (…) de maintenir ou établir une distinction entre droit pénal et droit disciplinaire ou administratif ».

D’autre part, elle pose des limites à la souveraineté des États en vérifiant sur le terrain de l’article 6 que les sanctions administratives ne masquent pas des sanctions pénales en les requalifiant au besoin.

À cet effet sont utilisés trois critères, « un faisceau d’indices » (55), représenté sous la forme de trois critères que la Cour applique de manière alternative et non cumulative, du moins en matière fiscale (56).

La Cour européenne examine alors la qualification conférée par le droit interne à la sanction, puis la nature de l’infraction et enfin le degré de gravité de la sanction. Toute sanction administrative de caractère répressif n’est donc pas systématiquement considérée comme relevant de la matière pénale (57).

Dans la mesure où, grâce à l’action conjuguée du législateur, du juge communautaire, des juridictions administratives et judiciaires, le droit du contentieux des sanctions fiscales a évolué dans une « euro compatibilité » croissante (58).

Néanmoins, contrairement à la Cour de Cassation et au Conseil d’État qui privilégient comme critère d’identification de la matière « pénale » au sens de l’article 6 de la Convention, le critère, de la nature de l’infraction (59), la Cour européenne des droits de l’homme persiste cependant à entretenir une certaine incertitude en utilisant tantôt alternativement, tantôt cumulativement, des critères de qualification retenus sur le caractère pénal d’une sanction (60).

Cependant à l’occasion de l’arrêt Bendenoun la Cour européenne des droits de l’homme a clairement stipulé que le bénéfice des garanties de l’article 6 de la Convention ne vaut que pour la phase contentieuse de mise en cause d’une pénalité fiscale, mais pas pour la procédure conduisant à son prononcé (61)

Cependant , la Cour fait application à la procédure administrative se déroulant devant la Commission des infractions fiscales, notamment du principe selon lequel les garanties du procès équitable valent aussi bien pour la phase d’instruction d’une instance juridictionnelle pénale, dès lors que leur inobservation intitulée risque de compromette gravement le caractère équitable du procès (62).

Reste toutefois que la question de savoir si la prise en compte du respect des exigences du procès équitable, joue à l’identique tant pour les phases d’instruction de procès pénaux, que pour les procédures administratives d’édictions de sanctions fiscales, prolongées le cas échéant par une instance contentieuse (63).

Il semblerait toutefois possible de prétendre que l’assujettissement aux exigences du « procès équitable » devrait à tout le moins concerner les majorations de droit, les pénalités de taxation d’office, les droits supplémentaires prononcés en matière d’enregistrement (64). Ainsi, prenant acte des principes directeurs dégagés par la jurisprudence européenne, la Cour de Cassation (Chambre commerciale) a laissé entendre que toutes les majorations d’impôt, et pas seulement les pénalités n’ayant à aucun titre un caractère indemnitaire, seraient soumises au jeu de l’article 6 de la Convention (65).

Les divergences d’appréciation sur la nature des garanties offertes au contribuable, portent essentiellement, sinon exclusivement, sur les deux séries de garanties les plus sensibles au regard des spécificités du contentieux des sanctions fiscales, à savoir, d’une part, l’étendue du pouvoir reconnu au juge fiscal, et d’autre part, le respect de l’égalité des armes entre contribuable et administration fiscale.

La consécration en l’occurrence d’une certaine compétence de modulation juridictionnelle des sanctions fiscales s’appuie sur une prise en considération des exigences dégagées par le Conseil constitutionnel quant à la soumission de sanctions administratives et fiscales au jeu de la proportionnalité.

Mais dès lors que le juge administratif est à même d’apprécier le comportement du contribuable, et partant d’effacer la pénalité, le contrôle exercé apparaît comme suffisant au regard des exigences de l’article 6 de la CEDH (66). Ainsi conformément à une option précédemment arrêtée par la Commission (67), la Cour a estimé que le contrôle exercé par le juge administratif français sur la sanction automatique de retrait de points du permis de conduire répondait aux impératifs de l’article 6 de la convention, dés lors que « la loi elle-même a prévu, dans une certaine mesure, la modulation du retrait de points en fonction de la gravité de la contravention commise par le prévenu » (68).En effet l’existence d’une modulation législative des sanctions fiscales suffit à satisfaire aux exigences de l’article 6 de la Convention (69).

Plus récemment encore, la Cour européenne des droits de l’homme a pu confirmer que la présomption d’innocence consacrée par l’article 6 jouait pleinement en matière de sanctions fiscales « pénalisées » (70).

Le champ d’application de l’article 6§1 de la CEDH se limite donc aux procédures ayant pour objet une accusation en matière pénale ou une contestation sur des droits et obligations de caractère civil (71).

Pour la Cour européenne des droits de l’homme, un contribuable ne peut être regardé comme pénalement accusé que s’il encourt des sanctions administratives sévères, telles que des « majorations d’impôt qui ne tendent pas à la réparation pécuniaire d’un préjudice , mais visent, pour l’essentiel, à punir afin d’empêcher la réitération d’agissement semblable » (72).

En raison alors du pourcentage élevé traduisant un but dissuasif et préventif, le Conseil d’État assimile à de véritables peines les majorations de droit prévues par l’article 1789-1 du CGI, bien qu’elles soient prononcées par l’autorité administrative (73).

Au sens de la Convention, la nature civile d’une affaire se déduit alors de l’enjeu patrimonial qu’elle présente pour le justiciable.

Par cette voie d’action, pourraient alors se trouver engagés dans une cause civile les particuliers en procès avec l’Administration pour défendre leurs intérêts pécuniaires (74).

Tout type de procédures qui aboutirait alors à une décision relative aux charges fiscales devrait se trouvait engagé dans le champ d’application de l’article 6§1 de la CEDH , puisque la logique voudrait que l’impôt affecte le patrimoine du contribuable assujetti.

Le problème est que la Cour de Strasbourg refuse encore d’analyser les rapports du contribuable avec l’État comme une relation de type civil entre un débiteur et son créancier, puisque cette situation « ressort exclusivement du domaine du droit public » (75).

Le sujet dont le comportement est assez « délictueux » pour justifier des poursuites pénales aurait alors plus d’assurance de faire vérifier la garantie de ses droits issue de l’article 6§1, tandis que l’individu de bonne foi, qui conteste une somme réclamée, pourra être condamné sans savoir s’il a bénéficié d’un procès équitable.

L’arrêt rendu par le Conseil d’État le 26 novembre 1999 (76) confirme alors l’interprétation européenne, dans le sens où, le juge de l’impôt n’est pas habilité à trancher une contestation afférente à un droit de caractère civil lorsque la requête dont il est saisi porte sur l’étendue des bases de taxation ; il n’a donc pas à répondre aux divers arguments du demandeur.

Pourtant, cette solution diverge fortement des solutions retenues par la Cour de Cassation, qui n’admet pas que tout un volet du contentieux fiscal puisse échapper aux garanties du procès équitable, sous prétexte de la souveraineté de l’État en la matière.

L’article 6 §1 pourrait cependant avoir vocation à s’appliquer à la procédure de taxation d’office en matière de droits d’enregistrement (77), aux perquisitions fiscales (78), ou encore dans les litiges relatifs au recouvrement des impositions (79).

Tout autant, l’absence de réelle motivation du Conseil d’État à utiliser l’article 6§1 de la CEDH dans le domaine fiscal non-répressif tranche avec l’attitude plus compréhensive des juridictions « inférieures », qui n’hésitent pas à invoquer le texte dans des litiges étrangers au thème des pénalités, où la discussion porte exclusivement sur l’existence et la quotité de l’obligation fiscale (80).

La contradiction demeure, semble-t-il, entre jurisprudence nationale et européenne.

Si la Cour européenne a bien décidé que l’article 6-1 de la Convention est applicable à la majoration d’impôt pour absence de bonne foi prévue par l’article 1729-1 du CGI (81), la Cour de Cassation et le Conseil d’État en tirent des conséquences différentes, voire totalement opposées (82).

La Cour de Cassation a pu ainsi, dans son arrêt Ferreira du 29 avril 1997 (83), déclarer contraire à la Convention européenne des droits de l’homme l’amende fiscale pour défaut d’acquisition de la vignette automobile en raison de l’automaticité de son application par l’Administration, reconnaissant ainsi un pouvoir de modération au juge judiciaire en matière de sanctions fiscales.

Le conseil d’État quant à lui considère que  » les dispositions de l’article 1729-1 du CGI, qui proportionnent les pénalités selon les agissements commis et prévoient des taux de majoration différents selon la qualification donnée au comportement du contribuable, sont compatibles avec les stipulations de l’article 6§1 de la Convention (84).

 

LES PROLONGEMENTS « SUBSTANTIELS »
DE LA GARANTIE CONVENTIONNELLE

Au fil des années, les affaires fiscales portant sue la mise en cause de droits substantiels (85) sont devenues plus nombreuses.

LA PROTECTION DES DROITS SUBSTANTIELS DANS LEUR APPLICATION A LA FISCALITE

Prise globalement, la jurisprudence de Strasbourg est une jurisprudence plutôt « fermée » (86), car, non seulement elle ne donne qu’exceptionnellement gain de cause aux requérants au fond, mais également, elle définit plutôt restrictivement les voies d’actions, soit l’invocabilité en matière fiscale des garanties substantielles affectées par la Convention.

Néanmoins, trois séries de prescriptions constituent semble-t-il le noyau dur des moyens de protection substantiels accordés au contribuable.

Il s’agit de l’article 8, de l’article 1 du premier protocole additionnel et de l’article 14.

Garantissant le droit au respect de la vie privée, du domicile et de la correspondance, l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme est l’une des prescriptions les plus fréquemment invoquées donnant lieu à des interprétations jurisprudentielles particulièrement constructives.

Au-delà du célèbre contentieux des écoutes téléphoniques motivées par la répression pénale de la fraude fiscale (87), l’article 8 semble avoir largement les faveurs du contribuable soucieux de s’opposer au droit de communication d’informations existant au profit de l’administration fiscale, ou à la publicité de leur situation fiscale au bénéfice de tiers, ou encore à des perquisitions domiciliaires.

Cependant l’obligation faite à un contribuable de justifier ses dépenses prévues, en l’occurrence l’utilisation de sommes provenant de la vente de biens, constitue certes une ingérence dans le droit au respect de la vie privée, mais est nécessaire à la défense du bien-être économique du pays (88).

En ce sens, l’atteinte à la vie privée profite d’une large présomption de conventionnalité, dès lors que, destinée à prévenir la fraude fiscale, elle est justifiée par la protection du bien-être économique du pays.

À l’identique, l’existence d’un fichier de débiteurs fiscaux accessibles aux tiers constitue, eu égard aux usages nationaux, une ingérence nécessaire au bien-être économique du pays et à la protection des droits d’autrui (89).

Cependant, les solutions arrêtées par la Cour européenne quant aux exigences s’imposant aux visites domiciliaires sont riches d’enseignement sur les limites des prérogatives des administrations fiscales.

Contrairement à la Cour de justice des communautés qui se refuse encore à envisager une protection des locaux d’une entreprisse sous l’angle des garanties reconnues en substance par l’article 8 de la CEDH (90), la Cour européenne des droits de l’homme considère que la protection du domicile joue aussi au profit des locaux mixtes (91) ainsi que des locaux strictement professionnels (92).

La Commission est allée même jusqu’à admettre que le siège d’une société devait être assimilé à un domicile au sens de l’article 8 (93) En optant alors pour une conception large des notions de domicile et de vie privée, les instances de la Convention ont voulu éviter de distinguer entres les individus selon la nature de l’activité en cause.

Ainsi, dans l’arrêt Funk, la visite domiciliaire et la saisie de documents ont constitué une ingérence dans certains des droits garantis par l’article 8.

Sans doute cette ingérence visait avant tout au bien-être économique du pays, objectif déjà reconnu comme légitime par l’article 8§2, mais pour la Cour, c’est à la condition que la législation et la pratique offrent des garanties adéquates et suffisantes contre les abus.
Or, en l’espèce, l’administration des douanes disposait de fort larges pouvoirs. Elle appréciait seule l’opportunité, le nombre, la durée et l’ampleur des opérations de contrôle.

La Cour a donc relevé qu’en l’absence d’un mandat judiciaire, les restrictions et conditions, prévues par la loi, apparaissaient trop lâches et lacunaires pour que les ingérences dans les droits du requérant fussent étroitement proportionnées au but légitime recherché (94) .

La protection de l’article 8 a alors permis d’anéantir les visites et les saisies qui étaient les opérations préalables à toutes constatations d’infractions économiques et fiscales.

La notion de « domicile » doit alors être entendu au sens large, et englobe par conséquent, les domiciles professionnels, tout autant que les locaux commerciaux..

Les investigations fiscales peuvent donc empiéter sur la vie privée des contribuables, telle que garantie par l’article 8, sachant que les locaux professionnels et la correspondance ne sont pas exclues du champ d’application.

Dans l’affaire Weinstein soumise à la Cour de Cassation le 4 mais 1999 (95), les services fiscaux avaient découvert l’existence d’une activité professionnelle non déclarée qu’une société monégasque menait sur le territoire français à l’intérieur d’un appartement loué par l’un des associés.

L’Administration avait obtenu des pièces assimilables à des éléments de la vie privée, en l’occurrence des factures d’eau et d’électricité prouvant une occupation permanente des locaux, contrats d’abonnement au réseau téléphonique montrant que l’intéressé disposait de trois lignes, relevés de communication faisant apparaître un grand nombre d’appel à destination de l’étranger.

Estimant que les agents du fisc avaient percé des secrets intimes sans lien avec les agissements reprochés, l’opérateur concluait à l’inconventionnalité de l’immixtion.

Or, le droit au respect de la vie privée n’est pas inviolable mais, se prête plutôt à des ingérences de la puissance publique qui doit agir sur un fondement légal, pour satisfaire un besoin social impérieux, au moyen de mesures proportionnées au but légitime poursuivi.

Pour rejeter le pourvoi, la Cour de cassation a considéré comme réunies les trois conditions de légalité, nécessité et proportionnalité.

L’intrusion a pour base légale les dispositions de l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales. Ensuite la norme répond à un but d’intérêt général, à savoir combattre la fuite devant l’impôt. Son caractère nécessaire peut s’expliquer par les difficultés que l’État rencontre dans la lutte en question, compte tenu des manÅ“uvres frauduleuses de plus en plus ingénieuses. Enfin, l’intervention préalable, en l’espèce du juge du TGI élimine de manière définitive le risque d’arbitraire.

Ce magistrat, qui est au cÅ“ur de la procédure, ne peut autoriser l’opération que s’il existe des indices sérieux de fraude, rassemblés de manière licite par l’Administration. C’est donc à lui de vérifier que le recours à une visite domiciliaire n’est pas disproportionné.

Il lui incombe alors, de sanctionner tout éventuel dérapage, comme l’accès a des bâtiments dont la fouille n’a pas été autorisée.

Cet encadrement judiciaire du droit de visite et de saisie est crucial.

De ce fait, selon la Cour européenne des droits de l’homme, en l’absence d’un mandat judiciaire à l’origine de la collecte d’informations, une mesure d’enquêtes coercitive ne saurait passer pour proportionnée.

Ainsi la France a été obligée de réformer la Code des douanes car, traditionnellement, l’administration douanière « avait compétence pour apprécier seule l’opportunité, le nombre, la durée et l’ampleur des opérations de contrôle (96)

Le respect, des exigences imposées par l’article 1 du protocole additionnel n°1 aux États de réglementer l’usage des biens pour assurer le paiement des impôts et contributions, contrairement à ce qu’une lecture trop littérale pourrait laisser supposer, ne leur ouvre pas un droit inconditionnel de déroger aux garanties découlant du paragraphe 1 du même article.

Toutefois l’importance de la marge d’appréciation reconnue aux États dans le domaine de la réglementation de l’usage des biens conduit le domaine de l’imposition fiscale à une assez large neutralisation ou pour le moins à une marginalisation des exigences régissant la privation de propriété.

Ainsi dans nombre d’espèces où la juridiction administrative a eu à connaître d’une contestation fondée sur l’article 1 du Protocole additionnel, le juge a systématiquement rappelé le contenu de cet article, qui contient dans son libellé sa propre limite: « Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.

Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les États de mettre en vigueur des lois qu’ils jugent nécessaires pour réglementer l’usage des biens conformément à l’intérêt général, ou pour assurer le paiement des impôts ou d’autres contributions ou des amendes » et a pris le soin, dans chaque cas, de signaler, souvent de manière implicite, que l’article 1 du Protocole additionnel est applicable à la matière fiscale dans la mesure où le juge ne l’exclut pas en tout état de cause (97).

Cependant une décision de la Cour retiendra plus particulièrement notre attention. Dans l’affaire Gasus Dosier-und Födertechnik Gmbh c/ Pays-bas (98), la société requérante se plaignait de ce que, ayant revendiqué un bien vendu avec une clause de réserve de propriété, elle s’était vue opposer la saisie et la vente de la machine par l’administration néerlandaise en paiement d’une dette fiscale.

La Cour a relevé que le fisc néerlandais pouvait saisir des biens garantissant le fond, et ce, sans obligations de ne saisir que les biens appartenant au débiteur. Elle a jugé que la clause de réserve de propriété constituait dans plusieurs systèmes juridiques une méthode acceptée de renforcement de la position du créancier dans les procédures d’exécution, et que cela n’interdisait pas l’adoption de lois renforçant la position du fisc dans de telles procédures et ne constituait pas, en soi une violation de la Convention.

S’agissant de vérifier l’existence de la proportionnalité, de l’absence de charge spéciale et exorbitante, la Cour a noté que l’activité commerciale comportait un risque que la société aurait pu éliminer par d’autres pratiques commerciales. Elle a, en outre, jugé qu’elle avait permis au débiteur de l’impôt, même involontairement, d’avoir un semblant de solvabilité, que le fisc n’avait pas les mêmes moyens de se protéger qu’un partenaire commercial et, enfin, que la société avait pu faire contrôler la mesure par un tribunal.

Elle a conclu dès lors au respect de la proportionnalité et, partant, à la non-violation de l’article 1 du protocole n°1.

Cependant, la combinaison de l’article 14 et l’article 1 du protocole additionnel de l’arrêt du Conseil d’État SCI de la Porte Perrière (99) nous amène de nouvelles possibilités pour l’application du droit au respect des biens.

Le droit à ne pas subir de discrimination dans la jouissance des droits protégés intéresse le contribuable d’une certaine manière.

Si l’on assimile, en effet, l’obligation de payer l’impôt à une réglementation de l’usage des biens au sens de l’article 1 du Protocole additionnel n° 1, toute personne qui s’estime privée sans justification objective et raisonnable d’un avantage accordé à d’autres assujettis, pourra accuser la loi fiscale d’introduire une disparité de traitement, violant l’article 14 de la Convention.

Dans l’arrêt SCI de la Porte Perrière, la question de l’applicabilité, dans un litige fiscal, du principe européen de non-discrimination combiné avec le droit au respect des biens, était posée au Conseil d’État.

Une SCI, propriétaire d’un immeuble à usage industriel et commercial, sollicitait un dégrèvement de la taxe foncière aux motifs que le locataire avait quitté les lieux depuis plus d’un trimestre.

Or l’article 1839 du CGI prévoit que certaines propriétés bâties inoccupées pendant une durée supérieure à trois mois sont susceptibles d’une imposition allégée, mais tout dépend de la destination de l’immeuble.

Celui-ci doit être en vacance d’une maison normalement occupée destinée à la location, soit résulter de l’inexploitation d’un immeuble utilisé par le contribuable lui-même à usage industriel ou commercial.

La société qui donne en location des locaux commerciaux ne peut donc prétendre au bénéfice du dégrèvement en cas de départ du preneur.

Le problème que le Conseil d’État n’a pas voulu résoudre est de savoir si l’intéressé avait raison d’invoquer les dispositions de la Convention européenne des droits de l’homme comme ayant trait au litige. La jurisprudence européenne est sans équivoque : les prélèvements fiscaux relèvent du champ d’application de l’article 1 du protocole additionnel n°1, et en vertu de l’article 14 aucune discrimination ne doit être pratiqué en ce sens.

En conséquence de quoi, un État méconnaît ces stipulations s’il instaure une différenciation arbitraire entre plusieurs catégories d’assujettis en situation comparable (100). Or, la juridiction administrative a été, en l’espèce, plus que réticente à déclarer opérant le moyen tiré de l’atteinte au principe d’égalité devant l’impôt conventionnellement garanti.

L’explication qui ressort de cet arrêt pourrait être que les conseillers d’État répugnent à devoir un jour contrôler par voie d’exception le caractère discriminatoire d’un texte législatif que le Conseil constitutionnel aurait déclaré fidèle au principe d’égalité devant les charges publiques (101).

Dans la mesure où la conception européenne de l’égalité rejoint la vision française, les chances sont peu nombreuses qu’une loi fiscale munie d’un brevet de constitutionnalité soit qualifiée de discriminatoire à l’issue d’une analyse menée à la lumière de la Convention européenne des droits de l’homme (102).

Il serait toutefois peu prudent de généraliser ce propos, puisqu’il est déjà arrivé que des mesures législatives validées par le Conseil constitutionnel se heurtent à une exigence prescrite par la norme européenne, en l’occurrence celle relative au procès équitable (103)

L’INFLUENCE DE LA PROTECTION CONVENTIONNELLE SUR LE SYSTEME DE LA COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTES EUROPEENNES

L’absence de réelles compétences fiscales attribuées à la Communauté par les États ne signifient pas que l’Europe se désintéresse de la question fiscale.

Seulement elle ne l’apprécie pas sous la forme d’une politique communautaire, en raison de l’insuffisance de dispositions lui permettant d’agir et du principe de l’unanimité qui régit la plupart de celles existantes, mais grâce à un acteur: le juge communautaire.

C’est lui, en effet, qui a pris le relais du législateur, et donc, des États pour tenter de combler la partie du déficit affectant la réalisation du Marché intérieur (104).

L’action du juge communautaire corrobore alors celle du juge de la Cour européenne des droits de l’homme en matière de droit fiscal.

Les compétences respectives des deux juridictions sont pourtant totalement distinctes, puisque la Cour européenne appréhende la fiscalité essentiellement au travers du prisme de l’article 6, mais il n’en reste pas moins des influences réciproques et des rapprochements flagrants entre les deux cours.

Ces influences réciproques des deux juges peuvent alors s’appréhender à l’analyse de plusieurs éléments.

Les méthodes d’interprétation des juges, tout d’abord, qui, indiscutablement, présente des similitudes, et ensuite, la tendance à l’absorption, voire à l’appropriation de la jurisprudence des droits de l’homme par le juge communautaire.

La CEDH fait en effet partie des sources formelles du droit communautaire, ce qui produit des conséquences non-négligeables pour la garantie de certains droits comme le droit au juge ou le principe de non-discrimination.

Les deux juridictions ont une mission d’interprétation du droit existant, et leur rapprochement est de plus en plus flagrant dans les méthodes d’interprétation qu’elles adoptent conjointement.

Par conséquent, dans les deux cas, le caractère « lacunaire » des traités a conduit les juges à développer une jurisprudence de plus en plus constructive.

La Cour de justice des Communautés a pu alors profiter de l’inertie du processus décisionnel pour se positionner comme l’institution motrice de la construction européenne.
Utilisant la méthode d’interprétation téléologique ou finaliste, elle a consacré la nature sui generis du droit communautaire, et en a déduit l’ensemble des principes fondamentaux qui en découlent, tout en refusant la plupart du temps les concepts nationaux pour forger des concepts purement communautaires.

De plus, le contrôle de type constitutionnel qu’elle opère l’a conduite à faire un usage très important du principe de proportionnalité, l’instrument par excellence régulateur de l’intensité du contrôle, largement utilisé par les Cours constitutionnelles.

C’est aussi ce contrôle qui l’a amenée à dégager, en l’absence de déclaration des droits, les principes généraux du droit communautaire et à s’inspirer de la jurisprudence de Strasbourg (105).

La Cour des droits de l’homme a également usé de la méthode d’interprétation finaliste. Elle a ainsi pu dégager une interprétation autonome des termes de la Convention et ne se considère pas liée par le sens des mots.

Tel est le cas des concepts de « tribunal indépendant et impartial », de « bien », d’ « accusation en matière civile et pénale » ou de « contestations des droits civils », de « délai raisonnable ».

Par ailleurs, en faisant souvent référence au droit commun des États membres, ou aux « principes qui prévalent dans une société démocratique », elle a forgé un standard minimum de protection des droits fondamentaux, et ne cesse d’affirmer que ces droits doivent êtres examinés « Ã  la lumière des conditions d’aujourd’hui », ce qui lui confère le monopole de l’interprétation et de l’évolution des droits garantis.

Elle considère ainsi que, dès lors qu’il n’existe pas de communauté de vue entre les États membres, on doit laisser une marge d’appréciation à l’État concerné.

En somme, l’interprétation évolutive des deux juridictions usent, toutes deux, de l’effet utile de l’interprétation évolutive, dans le but de se détacher des intentions initiales des fondateurs.

Indiscutablement le rapprochement des deux jurisprudences communautaire et européenne, fait que la coexistence des deux systèmes européens est source d’enrichissement pour les droits nationaux.

Elle permet leur évolution à la fois dans le domaine économique et dans celui des droits fondamentaux.

Mais elle peut être aussi la source de profondes oppositions et de divergences sans une coopération nécessaire entre les juges, que ce soit en matière économique, domaine nouveau mais croissant de la Convention européenne des droits de l’homme, et qui n’est plus l’exclusivité de la Cour de Strasbourg.

Le rapprochement des jurisprudences vient pour l’essentiel du juge communautaire.

Si, dans un premier temps, la Cour de justice des Communautés a procédé seulement par référence au droit de la Convention européenne des droits de l’homme, elle a dès 1974, avec l’arrêt Nold, mentionné explicitement « les instruments internationaux concernant la protection des droits de l’homme », comme élément permettant le développement des principes généraux du droit communautaire (106).

Mais, progressivement, en se rattachant directement à la Convention, à travers l’arrêt Rutili, la Convention européenne des droits de l’homme est devenue source matérielle du droit communautaire (107).

Ainsi, en matière d’accès à la justice, ou de droit au juge, la CJCE, s’est fondée pour l’essentiel sur l’article 6 de la CEDH pour développer les principes généraux du droit communautaire tels que l’obligation d’organiser des voies de recours, de motiver des décisions administratives ; il est même possible de retrouver des formules identiques dans les deux jurisprudences.

La dernière étape dans cette évolution fut semble-t-il franchie en 1998, avec l’arrêt Baustahlgewerbe (108), dans lequel la Cour de justice des Communautés sanctionne une procédure contentieuse en matière de droit de la concurrence, comme directement contraire à l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, et accorde une satisfaction équitable à la victime, sur le modèle de la CEDH.

Peut-on alors parler de « vampirisation » de la jurisprudence de la CEDH, de glissement de source matérielle à celui de source formelle, d’absorption, d’appropriation par le droit communautaire du droit européen. Certains auteurs ont même parlé d’une mort du droit européen des droits de l’homme (109).

Il n’empêche que l’élaboration de deux jurisprudences peut aboutir à des divergences comme, par exemple, la protection de l’article 8 des locaux commerciaux. En l’espèce la Cour de justice des Communautés refusait de considérer les locaux commerciaux comme bénéficiant de la même protection que le domicile privé (110) alors qu’au contraire, à Strasbourg, on étendait les garanties de l’article 8 aux dits locaux (111).

À l’identique, l’interprétation du principe d’accès à la justice, ne correspond pas tout à fait dans la jurisprudence communautaire, à celle de la Cour européenne. Si le juge européen se rattache à la notion de contestation sur les droits et obligations à caractère civil ou à la notion d’accusation en matière pénale, le juge communautaire, quant à lui, applique « le principe du droit au juge » à tous les litiges, même de nature administrative, faisant que l’exigence d’une protection juridictionnelles ne se limite pas aux simples droits civils mais à tous les droits issus du droit communautaire.

Il a ainsi développé une jurisprudence propre en matière de délai de recours, ou de recours à des mesures provisoires.

Dans l’arrêt Emmot (112), la Cour de justice a pu considérer que dans le cas d’une loi contraire à une directive non transposée, on prenait pour point de départ du délai de recours la transposition de la directive et non la date d’exigibilité des droits.

Pour la Cour, aucun délai national ne devait courir avant la transposition. Mais dans un arrêt du 2 décembre 1997 (113), à propos d’une imposition sur l’immatriculation des sociétés au Danemark, elle devait adopter une solution plus favorable aux États, les autorisant à opposer à une action en remboursement un délai de prescription qui court à compter de la date d’exigibilité des droits en cause, c’est-à-dire de la législation interne contraire, et non plus de la date effective de la transposition concernée.

Il est bien entendu que la Cour n’interviendra jamais sur la compatibilité d’une législation nationale avec le droit à un accès à la justice, si le droit communautaire n’est pas concerné. Le droit au juge n’étant qu’un corollaire de l’effectivité du droit communautaire.
Il est néanmoins nécessaire de relever que ces réticences régressent au fur et à mesure de l’évolution jurisprudentielle.

La cour du Luxembourg aujourd’hui tend, dans les cas les plus sensibles, à attendre une prise de position de Strasbourg, ou fait directement références aux arrêts de la CEDH (114).

De son côté, la CEDH a reconnu la spécificité du droit communautaire ainsi que l’originalité du processus d’intégration. Elle ne s’est pas limitée à une simple reconnaissance politique, puisqu’elle s’est souvent inspirée de la jurisprudence de la CJCE dans de nombreux domaines, comme à propos du droit de ne pas témoigner contre soi-même, du droit au nom.

Aujourd’hui on peut avoir quelques inquiétudes sur ces relations. En effet, l’intégration de la CEDH dans le traité d’Amsterdam, en particulier avec l’article 6, et surtout l’adoption par le Traité de Nice de la Charte communautaire des droits fondamentaux, qui se réfère directement à la Convention européenne des droits de l’homme, permet de se poser la question des interférences et de la concurrence entre les deux juridictions, ainsi que des conflits qui peuvent en résulter en cas d’opposition..

En réalité, les espérances suscitées par les arrêts, Bendenoun, Stenuit et tous autres, concernant l’évolution du droit fiscal, ont été largement déçues, car la soumission du procès fiscal aux garanties du droit à un procès équitable n’a guère entraîné de remise en cause de l’ensemble des règles de la procédure fiscale, et la jurisprudence européenne ne semble plus elle-même, être en mesure susciter à l’avenir des transformations radicales du droit fiscal processuel.

Il peut alors être envisagé comme souhaitable, cette fois-ci, une collaboration entre les deux cours, pour dépasser le blocage actuel, permettant un meilleur développement des droits de la défense pour le contribuable.

Thibauld MASSON,
Doctorant en droit européen
à la Faculté de droit de Nice Sophia-antipolis

Notes :
(1) En ce sens, voir J-F. Renucci, « Droit européen des droits de l’homme », 3° édition, L.G.D.J 2002, p.52 et s.

(2) En ce sens, G. GEST, « La Convention et l’action des autorités fiscales », D.P.C.I. 1991, Tome 17 n° 4, p. 546-562).
(3) A titre de rappel, la Commission européenne des droits de l’homme a depuis disparu.
(4) concl. sous CE, Ass., 19 avril 1991, M. Belgacem et Mme Naïma Babas, R.F.D.A. 1991, n° 3, p. 503, et G. Cohen-Jonathan, rapport de synthèse in « Droits de l’homme en France, dix ans d’application de la Convention européenne des droits de l’homme devant les juridictions françaises », édit. Engel, 1985, p. 177 et s.
(5) J. Lamarque, « Le principe de la supériorité des conventions internationales ayant pour objet la protection des droits de l’homme reçoit application en matière fiscale », Sources du droit fiscal, Juris Classeurs: Procédures fiscales, édition 2000, Fasc. 116-10.

(6) CE, 17 avril 1989, req. n°83911, arrêt Pyyrottes: RJF 1989, n° 767.
(7) CAA Paris 1 décembre 1998, req. n°96-1962, arrêt Brethes: Dr. fisc. 1999, n° 29, comm. 597).
(8) CE, 18 mars 1994, req. n° 68799, arrêt SA Sovemarco-Europe: Dr fiscal 1994, n° 40, comm. 1703, note Tixier et Lamule; RJF 1994, n°532, concl. Ph Martin.
(9) CE, 15 février 1989, req. n°71364, arrêt Liberatore: RJF 1989, n° 401.
(10) PJ Ciaudo, « Les déficits des droits de la défense dans les procédures fiscales », Droit et Patrimoine, n° 79, février 2000.
(11) En ce sens, J-F Flauss, « Sanctions fiscales et convention européenne des droits de l’homme », RFFP, n)65, mars 1999, p. 77 et s.
(12) J-F Flauss, « Fiscalité et droits substantiels garantis par la Convention européenne des droits de l’homme » LPA 1994, n° 80, p. 15-24.
(13) F. Sudre, « Droit international et européen des droits de l’homme », 5° édition, PUF, 2001, p.126 à 137.

(14) Arrêt Golder du 21 février 19745, Série A vol. 18.
(15) Pour un aperçu détaillé de la question, voir, J-F Flauss, « Pénalités fiscales et Convention européenne des droits de l’homme », op. cit., p. 23-24.
(16) Voir « Convention européenne des droits de l’homme et fiscalité, Bilan et perspectives », LPA, 1994, n° 80.
(17) Arrêt du 24 février 1994, Série A, n° 284.

(18) CE, 30 novembre 1994, req. 128 516, SCI « Résidence dauphine »: Dr. fiscal 1995, n°8, comm. 319; 8 avril 1998, req. n° 163 722, « Mr Bournat »: Dr fiscal 1998, n° 51, com. 1138.
(19) CE, 18 mars 1994 req. n° 68 7999 et rec. 70 814, SA « Sovemarco-Europe »: Dr fiscal 1994, n° 40, comm. 1703, note G. Tixier et Th. Lamulle.
(20) CE, Sect., Avis, 31 mars 1995, n° 164 008, « SARL Auto Industrie Méric et a.: Dr fiscal 1995, n° 18-19, comm. 1006.; CE, Avis, 8 juillet 1998, n° 195 664, « M. Fattel »: Dr fiscal 1998, n° 40, comm. 842.
(21) CE, 2 juin 1989, req. n° 62979, « Bussoz »: Dr. fiscal 1990, comm. 342; ou 11 janvier 1993, req. n° 78895, « SA Georges Best »: RJF 1993, n°816.
(22) C, 2 juin 1989, req. n° 62979 et 66604, 31 juillet 1992, op. cit.

(23) CE, 10 juillet 1989, req. n° 67268, « Brancourt »: Dr. fiscal 1990 comm. 4; RJF 1989, n° 1072.
(24) Cass. com, 20 novembre 1990, « Donsimoni »: « RJF 1991, n° 123, Bull. civ. IV, n° 288.
(25) Cass com., 4 janvier 1994, « Bruyelle », Dr. fiscal1994, comm. 1339; RJF 1994, n° 498; Bull. civ. IV, n° 8.
(26) Dr. fiscal 1996, comm. 986, concl. Y. Monnet; RJF 1996 n° 1118; Bull. civ. ass;, n°5; JCP E 1996, n°873, concl. Monnet- Dans le même sens, Cass. com., 25 février 1997, « Robert »: Dr fiscal 1997, comm. 644- 1 avril 1997, « Allin »: RJF 1997, n° 1216.
(27) En ce sens, Déc. n° 1904/63, ann. 9, p. 268; n° 2717/66 ann. 3, p. 176; n° 8903/80: DR 21, p. 246; n° 11.194/84, 13 décembre 1985, « Passicousset ».
(28) CEDH, 20 avril 1999, aff. 41601/98, « Vidacar SA »: RJF 1999, n° 1487.

(29) J-P Le Gall, « Les recours des contribuables sur le fondement de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales: a propos de l’arrêt Bendenoun », Dr. fiscal 1994, n° 21-22,p. 878.
(30) Arrêt Ringeisen, du 16 juillet 1971: Série A, n° 13.
(31) O. Dugrip et F. Sudre, « Du droit à un procès équitable devant les juridictions administratives », RFDA mars-avril 1990, p. 203-223.

(32) Commission, déc. 8 juillet 1980, req. N) 890380: DR 21, p. 246- 4 mai 1983, Xc/ France: DR 32, p. 266- 9 décembre1988, req. n°13 550/ 88, Wlater Schratc/ RFA, sur la partialité de la procédure fiscale en Allemagne.
(33) Arrêt Darby c/ Suède, 23 octobre 1990: Série A, n° 187.
(34) J-F Flauss: « Actualité de la Convention européenne des droits de l’homme », AJDA, janvier 1992.
(35) CEDH, 26 mars 1992, n° 58/1990/249/830, éd. Périscope: RJF 1992, n° 1279.
(36) CEDH, 22 septembre 1994, n° 23/1993/418/497, arrêt « Hentrich »: Dr. fiscal 1994, n° 50, chron. Legall et L. Gérard; RJF 1995, n° 131; AJDA 1995, p. 220, chron.. J-F Flauss.

(37) CEDH, 2″ octobre, 1997, aff. 117/ 96: RJF 1997, n° 1215; JCP G 1998, 1, 107, chron. F. Sudre, n° 25; AJDA 1998, p; 989, chron. J-F Flauss.
(38) J-F Flauss: « Actualité de la Convention européenne des droits de l’homme »: AJDA, juin 1992.
(39) En l’espèce CEDH, 12 juillet 2001, n°44759/98 grande ch., Ferrazini c/ Italie.

(40) CourEDH, 21 octobre 1997, Pierre Bloch c/ France à propos du droit de se porter candidat à une élection à l’Assemblée nationale et CourEDH 8 décembre 1999, Grande Ch., Pellegrin c/ France, à propos de l’occupation d’emplois impliquant une participation à l’exercice de la puissance publique.
(41) CEDH 9 décembre 1994, Schouten c/ Pays-Bas, RJF 10/95 n°1229 à propos d’un litige ayant trait à des cotisations sociales.

(42) En ce sens, Cass. ass. plen. 14 juin 1996 n°402P, Kloekner, RJF 8-9/96n°1118, aux conclusions contraires précitées de l’avocat général.
(43) Décision du 1 décembre 1992, E. Perrin c/ France, requête n° 18656/91, Rapport du 10 décembre 1992, arrêt Bendenoun c/ France , requête n° 12547/86.
(44) Avec l’arrêt Bendenoun du 2′ février 1994, Série A n° 284.
(45) Voir « Convention européenne des droits de l’homme et fiscalité: Bial et perspectives, LPA 1994, n° 80.
(46) op. cit.
(47) Décision N° 114/64, 12 mai 1987: DR 53, p. 85.
(48) Déc. n° 18.656/91, 1 décembre 1992, arrêt Perin, AJDA 1993, p. 487, croh. J-F Fkauss.
(49) RJF 1994 n° 503, chron. G. Goulard; Les Petites affiches 11 mai1994 p. 21 note J-F Flauss; AJDA 1994, p. 878, chron. Le Gall et Gérard; JCP G 1995, II, 22372, note S.N. Frommet.
(50) Voir en ce sens, G. Cohen-Jonathan, « La convention européenne des droits de l’homme », Economica 1989, p. 402 et, L.E Petiti et a., « La Convention européenne des droits de l’homme », Economica 1995, p. 254.

(51) Cass. Crim, 16 mai 2001, n° 00-82 649, M.G.
(52) Voir, J. Lamarque, « Sources du droit fiscal: sources internationales, application du principe de supériorité des normes internationales, protection des droits de l’homme », Juris Classeur, Procédure fiscale, op. cit.
(53) Arrêt Engel c/ Pays-Bas , 8 juin 1976: Série A, n° 22.
(54) Arrêt Oztürk c/ RFA, 21 février 1984: Série A n°123.
(55) J-F Flauss, « Sanctions fiscales et Convention européenne des droits de l’homme », op. cit., et J-P. Le Gall et L. Gérard: « Les recours des contribuables sur le fondement de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales », op. cit.
(56) Pour une analyse complémentaire du « faisceau d’indice », CEDH, 29 août 1997, aff. 71/1996, points n° 39 à 43: RJF 1997, n° 1097.
(57) Voir en ce sens, la décision d’irrecevabilité du 7 novembre 1990, v. Pays-Bas, req. n° 16431.
(58) L. Barone, « L’apport de la Convention européenne des droits de l’homme au droit fiscal français », Thèse Paris XIII, ronéo, spec. p. 79 à 216.

(59) F. Sudre, « L’onde de choc de l’article 6 de la CEDH en matière de sanctions fiscales », JCP 1997 II-22935.
(60) En ce sens, arrêt du 24 septembre 1997, Garyfallou c. Grèce.
(61) Rapport du 10 décembre 1992, requête n° 12547/86, arrêt du 2 » février 1994, « Bendenoun », Série A n° 284.
(62) Principe consacré par l’arrêt du 24 septembre 1993, Imbrioscia c/ Suisse, Série A n° 275.
(63) Pour une réponse affirmative dans le sens, voir F. Sudre , « l’onde de choc de l’article 6 de la CEDH », op. cit.
(64) En ce sens,J-F Flauss,  » Pénalités fiscales et convention européenne des droits de l’homme », op. cit.
(65) En ce sen, l’opinion émise par l’annotateur de l’arrêt Ferreira, Cass. Com. 27 avril 1997, Bull. Civ. IV n° 110, dans la revue de jurisprudence fiscale: RJF 1997, n°641.
(66) Contentieux fiscal R.G.P. n° 2 1998, p. 131-132.
(67) Rapport du 29 mai 1997, J. Malige c/ France , requête n° 27 812/ 95 Obs. J-F Flauss AJDA 1997 p. 982.
(68) Arrêt du 23 septembre 1998.
(69) En ce sens, décision du 29 juin 1998, Taddéi c/ France , requête n° 36 118/ 97.
(70) Arrêt du 29 août 1997, A.P., M.P. et T.P. c/ suisse et E.L., R. L. et O.L. c/ Suisse.
(71) E. Garaud, bien utiliser les articles 6 et 7 de la CEDH devant les tribunaux : Themexpress Francis Lefebvre 2000, n° 6 et s>.
(72) Cour EDH, arrêt bendenoun, du 24 février 1994, à titre de rappel, JCP G 1995, II, 22372, note S.N. Frommel.
(73) CE, 8 juillet 1998, Dr. fiscal 1998, comm. 842.
(74) Cour EDH, arrêt Périscope c/ france, Dalloz, 1993, somm. p. 385, obs. J-F. Renucci.
(75) Arrêt Vidacar, Cour EDH, 20 avril 1979, RJF 11/1999, n° 1487.
(76) Ce, 26 novembre 1999, Genoun, Dr; fiscal 2000, n° 15, comm. 298, concl. J. Courtial.

(77) Cass. Com., arrêt du 4 janvier 1994: Bull. civ. IV, n° 8.
(78) Cass. Com., arrêt du 9 février 1993, JCP G 1993, IV, 944.
(79) Cass. Com., 20 novembre 1990: RJF 1/1991, n° 123.
(80) Voir en ce sens, E. Garaud, « Droit des affaires et droit de l’homme », JCP Paris, 22 juin 2000, édition E et A, n° 25, 986.
(81) Arrêt Bendenoun c/ France, op. cit.
(82) Voir en ce sens, P-J Ciaudo, « Les déficits des droits de la défense dans les procédures fiscales », op.cit.
(83) Cass. Com., 29 avril 1997, n° 1068, P+B, Ferreira, FR Lefebvre 26/97, p. 3.
(84) CE, avis, 8 juillet 1998, n° 195664, Fattell, RJF 8-9/ 98, n° 970.
(85) Par droits substantiels, nous entendons pour des raisons de commodités tous les droits garantis par Convention autres que ceux des articles 5, 6, 7 et 13.

(86) Nous nous permettons d’emprunter cette terminologie à J-F. Flauss, « Fiscalités substantiels garantis par la Convention européenne des droits de l’homme ».
(87) Sur ce point voir l’arrêt Huvig du 24 avril 1990, Série A, n° 176-B et J-F. Flauss, « Ã‰coute téléphonique: le point de vue de Strasbourg », R.F.D.A., 1991, n°1, P. 89 et s.
(88) D.R. 31, p. 241, D. 2, mars 1989, R. Visser c/ Pays-Bas, req. n° 12662/ 87.
(89) D. du 11 novembre 1985, Ludwall c/ Suède, req. n° 10473/83, D.R. 45, p. 121 et s.
(90) Arrêt du 21 septembre 1989, Hoechst c/ Commission, aff. 46/47 et 227/ 88.
(91) Arrêt du 30 mars 1989, Chapell Série A n°152.
(92) Arrêt du 16 décembre 1992, Niemitz, séria n°251-A, note F. rigaux, R.T.D.H. n°15, p. 480 et s.

(93) Déc. du 12 décembre 1992, NofivloraSweden Aktien Bolag, req. n°14369/88.
(94) Cour EDH,25 février 1993, Miailhe et Funke: RJF 1993, n° 1254.
(95) Arrêt weinstein, 4 mai 1999, RJF 8-9/1999, n°1007.

(96) Voir en ce sens, Cour EDH, 25 février 1993, Funke c/ France: Jcp G 1993, II, 22073, note R. et A. Garnon; D. 1993, p.457, note J. Panier.
(97) Voir note sous CE, 16 mai 1990, n° 88 782-95 932, G. de Gaspard: Dr. fiscal n° 48, comm. 2209, RJF 7/90, N° 825, p. 489.
(98) Arrêt du 23 février 1995, Série A n°306-B.

(99) Ce, 6 avril 2001, SCI de la porte Perrière, Dr fiscal 2001, comm. 947, concl. G. Bachelier.

(100) En ce sens, arrêt Darby c/ Suède op. cit.
(101) En ce sens, voir E. Garaud, « Droit des affaires et droits de l’homme », JCP E, n° 18-19, p. 756 et s.
(102) L. Barone, « L’apport de la Convention européenne des droits de l’homme, au droit fiscal français », L’Haramattan, 2000, n°549 et s.
(103) Cour EDH, 28 octobre 1999, Zielinski et Pradal c/ France: D. 2000, somm. p. 184, obs. N. Fricero.
(104) F. Péraldi-Leneuf, « L’articulation des compétences fiscales à l’échelon européen », Revue de droit fiscal 2001, n° 44-45, p. 1552 et s.

(105) F. Péraldi-Leneuf, « L’articulation des compétences fiscales à l’échelon européen », op. cit.
(106) Arrêt Nold du 14 mai 1974, aff. 4/73: Rec. CJCE p. 491.
(107) CJCE, arrêt Rutili du 28 octobre 1975, aff. 36/75, Rec. p. 1219.
(108) Aff. C185/ 95 : Rec. CJCE, I, p. 8417.
(109) Voir en ce sens, F. Sudre : « La communauté européenne et les droits fondamentaux après le traité d’Amsterdam ; vers un nouveau système européen de protection des droits de l’homme ? », JCP, éd. Gén., 1998, I, 100, p. 9.
(110) En ce sens, CJCE, 21 septembre 1989, aff. 46/87 et 227/ 88, arrêt Hoechst: Rec. CJCE, p. 2859.
(111) CEDH, 30 mars 1989, arrêt Chapelle c/ RU.

(112) CJCE, Plén., 25 juillet 1991, aff. C-208/90 : Dr. fiscal 1992, n° 29, comm. 1502, obs. E. Kornpbrost ; Rec. CJCE, p. 4269.
(113) CJCE, Plén., aff. C-188/95, Fantask : Dr. fiscal 1998, n° 11, comm. 198, étude P. Dibout, p. 349 s. ; rec. CJCE, p. 6783.
(114) A titre d’exemple, principe de l’égalité des délits et des peines, liberté de la presse etc…

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