LES DONATIONS ET LE PACTE DE FAMILLE

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Article publié dans la Revue « Fiscalité Européenne et Droit International des Affaires » N° 164

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Ces pages, dédiées à la discipline légale et fiscale des donations, se proposent de compléter notre article sur le droit des successions paru dans le numéro précédent de cette Revue[1].

En effet, bien que s’agissant d’un contrat, la donation est réglementée en Italie par le livre II du Code Civil intitulé “Des successions” et est assimilée aux successions dans le régime fiscal.

Cela pourrait sembler étrange, mais l’examen attentif qui suit fera comprendre que ces deux institutions sont strictement liées entre-elles et que l’esprit de la loi considère la donation comme une anticipation de l’attribution pour cause de mort.

Il n’est pas rare, en effet, que l’on se serve de la donation pour anticiper des biens successoraux. On pense, en outre,  au cas du legs de la propriété d’un certain bien qui avantage le gratifié et qui contient les caractéristiques d’une libéralité. Comme nous le verrons par la suite, la donation a un rôle spécifique au moment de la détermination des biens de la succession et de leur répartition.

La collation est le point de conjonction entre la succession et la donation et c’est l’institution spécifique de la répartition héréditaire. Elle consiste à conférer à la masse des biens de la succession héréditaire tous les biens que l’époux, les enfants légitimes et naturels ainsi que leurs descendants ont reçu du défunt par donation de manière directe ou indirecte, à moins que le de cujus ne les en ait dispensés.

L’institut juridique repose sur le fondement qu’en faisant don de biens, le de cujus n’a pas eu l’intention d’altérer le traitement qu’il a lui-même décidé par testament ou, en cas de succession légitime, établi par la loi, mais qu’il a simplement voulu attribuer un acompte sur la future part d’héritage. C’est la raison pour laquelle les biens doivent être conférés pour pouvoir être ensuite répartis entre les cohéritiers, proportionnellement aux parts qui leur reviennent.

Afin de donner cours à la collation, il est nécessaire qu’il existe une communion et donc qu’il y ait des biens à attribuer et, bien sûr, qu’il y ait plusieurs héritiers. En ce qui concerne l’apport de biens, alors que pour la collation de biens immobiliers il peut être choisi entre apporter le bien en nature ou en imputer la valeur dans sa propre portion, la collation de biens meubles se fait uniquement par imputation de la valeur qu’ils avaient à l’ouverture de la succession.

Comme nous l’évoquions précédemment, si le de cujus avait déjà disposé de tous ses biens de son vivant, la collation serait inopérante. Sous cet aspect également, la différence de ratio et de discipline entre la collation et la réunion fictive est donc évidente.

La première a un caractère réel et comporte un apport matériel du bien donné à la masse des biens de la succession héréditaire pour maintenir un certain équilibre dans la formation des parts d’héritage, tandis que la réunion fictive se réduit à un simple calcul mathématique, qui sert à établir et à calculer la part de réserve, tout en contrôlant quelle est la part dont le de cujus peut disposer.

En outre, on peut déroger aux normes sur la collation, alors qu’on ne peut pas déroger à celles concernant la réunion fictive. Si la collation a pour fondement la volonté du de cujus de ne pas altérer le traitement des cohéritiers mais simplement d’effectuer des attributions patrimoniales gratuites sur la future succession, ce même fondement vient à manquer si c’est le défunt lui-même qui veut avantager l’un de ses héritiers en prévoyant la dispense de la collation, qui consiste en une exonération contenue dans le contrat de donation ou dans le testament.

Du point de vue d’une exigence plus générale, le seul point commun entre la collation et la réunion fictive est que, dans les deux cas de figure, les donations reçues de son vivant par l’héritier ne peuvent pas léser la part de réserve des éventuels autres ascendants réservataires, de même que la dispense de la collation ne peut pas produire d’effets si ce n’est dans les limites de la portion disponible.

Enfin, les sujets concernés par les deux institutions et indiqués de manière spécifique pour la collation par l’article 737 c.c. diffèrent également. En effet, la collation s’effectue réciproquement entre époux et descendants, mais n’a pas lieu pour les étrangers.

Exemple : M. X nomme ses enfants Pierre et Paul comme ses héritiers pour un tiers chacun et laisse le dernier tiers à son ami Jacques. Il a déjà fait don à Pierre de son vivant de 600, sans dispense de la collation. A sa mort, son patrimoine s’élève à 1.500. Jacques reçoit sa propre part de 500, la règle de la collation ne s’appliquant pas aux tiers.

Par effet de la collation, la donation de 600 de Pierre est conférée de la manière suivante :

[1500 (relictum)-500 (jacques+600 (donatum)] : 2 (enfants) = 800 (part qui revient à chacun).

Pierre touchera seulement 200, ayant déjà obtenu 600 à titre de donation et son frère touchera 800 au lieu de 500.

Voyons à présent les caractéristiques précises de la donation et des autres actes juridiques caractérisés par la gratuité.

En règle générale, l’acquisition de droits ou l’engagement d’une obligation s’effectue en échange d’une contrepartie en argent. Toutefois, il n’est pas rare qu’une partie contractuelle exécute une prestation sans rien exiger en retour, de sorte que celui qui la reçoit obtient un avantage patrimonial sans devoir subir le moindre sacrifice. C’est le cas de la gratuité. Il y a des actes juridiques qui sont gratuits par nature comme le commodat, et d’autres qui peuvent être effectués à titre onéreux ou à titre gratuit, au choix des parties, comme le prêt. Dans des cas comme ceux-là, le commodataire et le prêteur ne subissent aucune diminution de leur patrimoine.

Une catégorie particulière d’actes juridiques à titre gratuit est représentée par les actes de libéralité qui enrichissent ceux qui en sont les destinataires, mais appauvrissent leur auteur.

Toutes les libéralités sont donc des actes effectués à titre gratuit, mais l’inverse n’est pas toujours vrai. En effet, il n’y a libéralité que si l’attribution patrimoniale effectuée sans contrepartie est soutenue par l’animus donandi et appauvrit le patrimoine du donneur en faveur du patrimoine du destinataire.

Le concept de la libéralité comprend non seulement la donation (libéralités rapportables à la donation) qui, pour être valable, requiert une forme précise, mais aussi les libéralités non rapportables à la donation qui, bien que n’étant pas de véritables donations sous le profil de la structure et de la forme, produisent le même effet :  les libéralités d’usage et les donations indirectes.

Les libéralités d’usage sont des actes de libéralité effectués “à l’occasion de services rendus ou conformément à l’usage”. Ce type particulier de libéralité, dépourvu de l’élément subjectif de la spontanéité car lié d’une manière ou d’une autre aux coutumes sociales, n’est pas à proprement parler une donation et n’est assujetti ni à la collation ni à la révocation. Ex.: donation pour une fête, pourboire au serveur, etc.

Dans les donations indirectes, le donateur a pour but d’enrichir un bénéficiaire, mais il atteint son objectif en utilisant des actes juridiques de nature différente de celle de la donation typique, par exemple en adoptant le schéma de la remise de dette, avec un contrat en faveur d’un tiers, avec l’accomplissement du tiers, l’achat d’un bien immobilier en faveur de son enfant en utilisant l’argent de ses parents, etc.

A l’article 769 du c.c., le législateur définit la donation comme “le contrat avec lequel, par esprit de libéralité, une partie enrichit l’autre en disposant en faveur de celle-ci d’un droit ou en assumant envers elle une ‘’obligation”. A partir de cette définition, nous pouvons déterminer 4 types de donation :

la donation réelle translative, qui a pour objet le transfert d’un droit de propriété ou autre droit réel de jouissance déjà existant dans le patrimoine du donateur. 

la donation réelle constitutive, qui a pour objet la constitution d’un droit réel. Un cas typique est celui où le propriétaire constitue en faveur du donataire un usufruit sur sa propre habitation.

la donation obligatoire, qui est celle ayant pour objet l’engagement de la part du donateur d’une obligation. Le cadre de cette libéralité est limité par la doctrine au seul acte de “donner”, estimant impossible dans ce cas l’obligation de “faire”.

la donation libératoire, qui est celle par laquelle le donateur-créditeur libère le donataire d’une dette, par seul esprit de libéralité.

Le législateur prévoit, en outre, la réglementation de certains cas de figure particuliers de donation :

la donation rémunératoire (article 770 c.c), faite par reconnaissance, en considération des mérites du donataire, ou encore par rémunération spéciale (libéralité en faveur d’un médecin qui nous a sauvé la vie ou à un bienfaiteur, etc.) et n’est pas soumise à révocation.

la donation avec réserve d’usufruit (article 796 c.c.), quand le donateur se réserve l’usufruit des biens donnés.

la donation par contrat de mariage (article 785), lorsqu’elle est effectuée à l’occasion d’un futur mariage. Elle peut être faite par les époux entre eux ou par autrui en faveur d’un ou des deux époux, ou encore en faveur des enfants qui vont naître. La particularité de cette libéralité est due au fait que la donation ne produit pas d’effet jusqu’à la date de la célébration du mariage, mais se parachève à ce moment sans qu’il n’y ait besoin d’acceptation et conserve ses effets même en cas de divorce. L’annulation du mariage, par contre, entraîne la nullité de la donation, les droits acquis par le tiers de bonne foi entre le jour du mariage et la date de l’arrêt qui en déclare la nullité étant maintenus.

La forme est un élément déterminant de la donation. Le contrat doit être effectué par acte public par le Notaire en présence de deux témoins et ce, sous peine de nullité. Hormis le cas des donations par contrat de mariage, le contrat se parachève avec l’acceptation du donataire et peut être effectué sur le même acte ou par acte public ultérieur. Jusque là, chacune des parties peut révoquer sa déclaration.

La solennité de la forme publique n’est pas nécessaire lorsque la donation peut être considérée comme une donation de valeur modérée, compte tenu des conditions économiques du donateur. Dans ce cas, on substitue à la forme la remise de la chose (donation manuelle).

Les sujets de la donation peuvent être des personnes physiques, mais aussi des personnes juridiques ou des organismes non reconnus. Ayant constaté l’importance sociale de protéger les sujets les plus faibles ainsi que celle d’offrir les meilleures garanties durant le transfert des biens, le législateur a indiqué des normes spécifiques sur les sujets qui peuvent apparaître aussi bien en qualité de donateur que de donataire.

Ne peuvent pas effectuer de donation, ceux qui n’ont pas la pleine capacité de disposer de leurs biens : les sujets mineurs, aliénés, inaptes, ainsi que les sujets incapables de comprendre et d’agir et ce, pour toutes les causes, même transitoires. La représentation légale du sujet incapable est prohibée, mais la donation effectuée par le mineur ou par le sujet aliéné dans son contrat de mariage est valable à condition qu’il y ait l’assistance des personnes exerçant l’autorité ou la curatelle.

A la différence du testateur, le donateur peut avoir recours au soutien d’un mandataire, mais dans certaines limites. Pour que la donation soit valable, il faut en effet qu’un tiers ait été désigné parmi plusieurs personnes, entre des personnes appartenant à des catégories particulières ou en faveur d’une personne juridique parmi celles indiquées par le donateur. Une disposition analogue est en vigueur pour le choix de l’objet de la donation.

En revanche, la capacité de recevoir la donation concerne l’aptitude à assumer la titularité du rapport juridique.

Elle revient à toute personne physique et peut notamment être effectuée en faveur de l’enfant qui va naître ou des enfants d’une personne, vivante à l’époque de la donation, même si les enfants n’ont pas encore été conçus. Dans ce dernier cas, si l’objet de la donation fructifie, les profits échus sont réservés au donataire jusqu’à sa naissance s’il est déjà conçu, ou sont conservés par le donateur jusqu’à la naissance de l’enfant pas encore conçu au moment de la donation.

La donation effectuée en faveur de plusieurs donataires est également admise. Les seuls exclus de la capacité de recevoir sont le tuteur ou protuteur, le notaire stipulant et les témoins de l’acte de donation.

En principe, peuvent faire l’objet de donation tous les biens qui détiennent les conditions de possibilité, licéité, détermination ou déterminabilité. Concrètement, pourtant, le législateur prévoit la nullité de la donation de biens futurs et de biens d’autrui. Est également interdite la donation  universelle, qui concerne tous les biens présents et futurs du donateur.

Est admise, en revanche, la donation qui a pour objet les prestations périodiques. Elle prend fin avec la vie du donateur, à moins que celui-ci n’ait exprimé une volonté contraire dans l’acte.

Nous avons vu que notre système judiciaire laisse la pleine liberté au donateur de disposer de ses biens et qu’il est soutenu dans ses actes par les garanties établies par le législateur. La condition de réversibilité établie par l’article 791 c.c. est particulièrement intéressante. En effet, le donateur peut stipuler, uniquement en sa propre faveur, la réversibilité des choses données en cas de prédécès du seul donataire, ou du donataire et de ses descendants. Ce pacte a pour effet de résoudre toutes les aliénations et de faire revenir au donateur tous les biens libres de tout poids ou hypothèque, à l’exception des garanties stipulées dans les conventions matrimoniales.

Mais, l’institution qui décrit le mieux l’intention du législateur de protéger le caractère fiduciaire et affectif de la donation est la révocation. En effet, contrairement aux dispositions testamentaires, librement révocables jusqu’au dernier instant de vie du testateur, les libéralités entre vivants, destinées à avoir une efficacité immédiate, se résilient uniquement dans les cas expressément prévus par la loi.

La révocation consiste dans la survenance de l’inefficacité du contrat de donation en présence de certaines circonstances prévues par la loi : révocation pour ingratitude (article 801 c.c.) et révocation pour survenance d’enfants (article 803 c.c.).

L’article 801 c.c. fait un rappel explicite à l’article 463 c.c., relatif à l’indignité successorale, en prévoyant que la demande de révocation pour ingratitude puisse être proposée uniquement dans les cas où le donataire aurait chargé sa conscience de comportements lésionnaires de la personne et de l’honneur du donateur et de ses ascendants, descendants ou conjoint (homicide, lésion, calomnie, injure), ou ait causé un grave préjudice à son patrimoine.

Les dispositions de l’article 803 c.c., qui est spécifique à la donation, sont plus particulières et intéressantes. Les personnes qui n’ont pas d’enfant ou savent qu’ils ne peuvent pas en avoir sont assurément plus faibles et plus facilement disposées à se dessaisir de leurs biens. Mais que se passerait-il s’ils découvraient, tout de suite après, qu’ils avaient, ou pouvaient avoir, une descendance légitime ? Le législateur a prévu que les donations effectuées par une personne qui n’avait pas d’enfant ou de descendant légitime – ou ignorait qu’elle en avait – à l’époque de la donation, peuvent être révoquées par la survenance ou l’existence d’enfants ou de descendants, ou dans le cas où un enfant déjà conçu au moment de la donation naîtrait. Cette même norme est également valable dans le cas où le donateur reconnaitrait un enfant naturel, pourvu que l’on puisse prouver qu’il n’avait pas connaissance de l’existence de son enfant au moment où le donateur disposait de ses propres biens. Cependant, dans ce cas, l’adoption ordinaire et la filiation sont exclues. L’action qui en dérive a une prescription de 5 ans et ne peut pas être proposée après la mort de l’enfant ou du descendant.

Il est intéressant de rappeler qu’en 2000, la Cour Constitutionnelle a déclaré constitutionnellement illégitime la partie de l’article 803 dans laquelle il était prévu que la donation puisse être révoquée uniquement si la reconnaissance de l’enfant naturel avait eu lieu dans les 2 ans à compter de la date de la donation.

A la lumière de ce qui a été dit, il faut souligner le fait que la doctrine considère la donation comme un acquêt non définitif de la propriété. En effet, la donation peut subir la révocation, mais elle peut aussi être mise à risque, comme nous l’avons vu, par la future succession. Les héritiers qui seraient lésés de la générosité du de cujus ont le droit de faire un recours contre la donation dans les dix ans à compter de sa mort.

Le cas où le de cujus se serait séparé de tous ses biens est encore plus dangereux. Si le système judiciaire admet la vente, qui comporte un équivalent en argent pour les héritiers, il tolère mal que la réglementation sur les successions soit contournée au moyen de cadeaux. C’est la raison pour laquelle la loi prévoit à travers l’action en réduction, qu’en cas de donations, les héritiers réacquièrent la propriété des biens donnés par le défunt, même si entre-temps ceux-ci ont été revendus à des tierces personnes. Si à la mort du donateur, les héritiers peuvent renoncer à l’action en réduction, tant que le donateur est en vie la loi n’admet aucune renonciation.

La loi prévoit que les acquéreurs suivants soient également préjugés de l’éventuelle action en réduction et cela rend, de ce fait, les biens immobiliers inaliénables pendant dix ans. Le législateur n’a obvié qu’en partie à ce problème en introduisant, en 2005, une limite de 20 ans à compter de l’ouverture de la donation. Une fois ce délai passé, les droits des tiers acquéreurs des biens faisant l’objet de la donation sont définitivement acquis et les hypothèques inscrites sur ceux-ci demeurent.

La loi n°55 du 14 février 2006 a introduit dans notre système judiciaire le pacte de famille, reconductible aux actes à titre gratuit, dans la mesure où :

– d’un côté, il est caractérisé par l’intention – qui n’est pas purement liée à la donation – de prévenir les disputes liées à l’héritage ainsi que le démembrement de sociétés ou de participations en sociétés, c’est-à-dire d’attribuer ces biens à des sujets aptes à assurer leur continuité gestionnaire.

– de l’autre, il ne comporte pas le versement d’une contrepartie en argent de la part du bénéficiaire de l’entreprise ou de participations à l’entreprise, mais comporte uniquement l’obligation pour celui-ci de liquider le montant qui est dû aux autres participants au contrat.

Le pacte de famille est le contrat conclu par acte public par lequel “… conformément aux dispositions en matière d’entreprise à caractère familial et dans le respect des différentes typologies de sociétés, l’entrepreneur transfère l’ensemble ou une partie de l’entreprise et le titulaire de participations à l’entreprise transfère l’ensemble ou une partie de ses quote-parts à un ou plusieurs descendants”.

L’esprit de cette loi repose sur la fonction sociale que joue l’entreprise dans le droit de la famille. Avec ce contrat, la continuité de l’activité de l’entreprise est, en effet, favorisée pendant la période qui suit la mort de l’entrepreneur, à travers une désignation préventive des sujets qui auront en charge la gestion de l’entreprise. Dans ce cas, on se trouve face à une dérogation expresse à l’interdiction des pactes successoraux présente dans notre système judiciaire. La doctrine a estimé qu’une telle dérogation est admissible car justifiée par l’intérêt de toute la famille à conserver en interne la richesse et la gestion de l’entreprise fondée par le de cujus. Les ayant-causes sont en effet le conjoint et tous ceux qui seraient des ascendants réservataires si la succession de l’entrepreneur s’ouvrait au moment de la stipulation du pacte de famille. Ceux qui se révèlent être les bénéficiaires de l’entreprise ou des participants à l’entreprise ont l’obligation de verser aux autres participants au contrat une valeur équivalant à la part de réserve, sauf en cas de renonciation des intéressés.

Il faut souligner que la somme reçue par les contractants n’est pas soumise à la collation ni à l’action en réduction et que le pacte de famille peut être modifié ou dissout uniquement par les participants eux-mêmes au moyen d’un nouveau contrat ayant les mêmes caractéristiques et les mêmes fondements que ceux indiqués au chapitre V bis du titre IV du c.c..

REGIME FISCAL

Le nouveau régime fiscal relatif aux successions, donations et autres actes à titre gratuit peut être déduit des dispositions apportées par les sources normatives suivantes :

– article 2 décret-loi n° 262 du 3/10/2006 n° 262, transformé -après modifications- par la loi n° 286 du 24 novembre 2006,

– article 1 loi n° 296 du 27/12/2006,

– article 1 loi n° 244 du 24 /12/2007.

Pour les donations, si les normes introduites par le décret-loi n° 262 du 3/10/2006 ne prévoient pas de disposition contraire, le principe transformé -après modifications- par la loi n° 286 du 24/11/2006 et intégrations et modifications suivantes, selon lequel les dispositions du TUS sont à nouveau applicables dans le texte en vigueur à la date du 24/10/2001 (D.Lgs. 346/90) est en vigueur.

Le système actuel d’impôts sur les donations prévoit :

– l’application de trois taux différenciés en fonction du degré de parenté entre le donateur et le donataire (4%, 6%, 8%) ;

– l’application de franchises pour certaines catégories de donataires (seuil de valeur en-dessous duquel l’impôt ne doit pas être payé).

En particulier :

– EPOUX ET ENFANTS (ou parents en ligne directe) paient un impôt de 4 % qui est calculé sur la part qui dépasse, pour chacun des bénéficiaires, la valeur de la franchise (1.000.000,00 €).

– FRERES ET SOEURS paient un impôt de 6 %, mais ont droit à une franchise de 100.000,00 €.

– AUTRES PARENTS jusqu’au 4ème degré, PARENTS PAR ALLIANCE en ligne directe et PARENTS PAR ALLIANCE en ligne collatérale jusqu’au 3ème degré (ex. oncles/tantes, neveux/nièces, petits-neveux/petites-nièces, gendres/brus, cousins/cousines,) paient un impôt de 6 %, sans aucune franchise.

– TOUS LES AUTRES SUJETS paient un impôt de 8 %, sans aucune franchise.

– LES PERSONNES RECONNUES GRAVEMENT HANDICAPÉES, conformément à la loi n° 104 du 5 février 1992, ont toujours droit à une franchise de 1.500.000,00 €.

Ces franchises se calculent toujours sur la valeur de la donation et pour chaque sujet. Rappelons, toutefois, que dans le calcul de la franchise, il faut toujours calculer les donations reçues au préalable par le sujet. De même, pour calculer l’impôt sur les successions, il faudra tenir compte des donations reçues par le de cujus quand il était en vie.

Il faut souligner que les titres de l’Etat ou autres titres assimilables, exempts de l’impôt sur la succession, sont en revanche taxés en cas de donation et que, si la donation comprend des biens immobiliers ou des droits immobiliers, l’impôt hypothécaire, qui équivaut à 2 % de la valeur du bien, ainsi que l’impôt cadastral, qui équivaut à 1 % de la valeur du bien, sont toujours dus.

En ce qui concerne la territorialité de l’impôt, la norme de l’article 2 du Décret législatif 346/90 établit que  l’impôt est dû et concerne tous les biens et droits transférés, même s’ils se trouvent à l’Etranger. Si le donateur réside à l’étranger au moment de la donation, l’impôt est dû exclusivement en ce qui concerne les biens et les droits existant en Italie. L’article énumère de façon détaillée les droits et les biens devant être considérés comme tels. Par exemple, les biens et les droits inscrits dans des registres publics de l’Etat et les droits réels de jouissance en dérivant, les crédits garantis sur les biens existant dans l’Etat jusqu’à concurrence de la valeur de ces mêmes biens, indépendamment de la résidence de l’obligé, etc.

Les articles 14-19 du Décret législatif 346/90 établissent la façon dont la valeur des biens constituant la donation doit être calculée. Selon l’usage, l’achalandage n’est pas pris en compte dans la valeur totale d’une société et, pour les biens immeubles, une “autoévaluation” est effectuée, qui ne doit toutefois pas être inférieure à la multiplication de la rente cadastrale pour les coefficients mis à jour en dérivant. Par contre, pour les titres cotés en bourse, la moyenne des prix du dernier trimestre précédant la donation est prise en compte, majorée des intérêts journaliers et des intérêts à échoir par la suite.

C’est toujours le législateur qui indique les cas où sont prévus des allègements fiscaux, en établissant l’exemption du paiement de l’impôt pour les donations effectuées en faveur de l’Etat, des Régions, des Provinces, des Communes, de mouvements et partis politiques, d’organismes poursuivant un but religieux, d’organisations à but non lucratif d’utilité sociale (ONLUS), etc.

De même que pour la succession, le législateur a décidé d’introduire, pour la donation également, à l’aide de normes spéciales dictées par le TUS, des allègements adressés à la famille et aux jeunes (achat de la résidence principale, exploitations agricoles situées dans des communautés montagnardes, entreprises de jeunes agriculteurs, pactes de famille).

En ce qui concerne la donation de la “résidence principale”, les mêmes allègements fiscaux que ceux prévus pour les successions s’appliquent. Si au moins un des donataires compte destiner le bien immeuble reçu en donation à constituer sa résidence principale, et en présence des conditions prévues par la loi en matière de résidence principale, le bénéficiaire paiera une taxe fixe d’un montant total de 336,00 € pour l’impôt cadastral et hypothécaire. Il faut préciser que cet allègement ne comporte la reconnaissance d’aucun bénéfice en ce qui concerne l’application de l’impôt sur la donation.

L’allègement s’applique uniquement aux biens immeubles qui sont objectivement destinés à être utilisés comme lieux d’habitation, à condition qu’ils n’entrent pas dans la catégorie des habitations de luxe.

Le bien immeuble doit être situé dans la commune de résidence ou dans celle du lieu de travail. Pour ne pas subir la déchéance de la susdite réduction, le transfert de résidence dans la commune où est situé le bien immeuble est autorisé dans les 18 mois à compter de la date de l’achat.

Le donataire ne doit pas être propriétaire ou copropriétaire d’une autre habitation située dans la même commune, ni même d’une autre habitation située dans une autre commune mais ayant été achetée avec les mêmes conditions de paiement.

Quand la donation concerne plusieurs personnes, chacun peut demander des “abattements pour la résidence principale” qui s’appliqueront pour chacun d’entre eux sur toute l’habitation.

Uniquement pour les enfants, les autres descendants et le conjoint, il existe également l’exemption de l’impôt de succession et de donation pour les transferts d’entreprises ou branches d’entreprise, de participations en sociétés et d’actions. Si l’entreprise comprend des biens immobiliers, le transfert est également exempt des impôts hypothécaire et cadastral. Il s’agit d’une réglementation fiscale introduite en 2007 afin de favoriser le passage générationnel de l’entreprise.

Une telle exemption ne s’applique pas à tous les transferts d’entreprises, mais seulement en présence de certaines conditions établies par la loi. Ces conditions sont :

Tout d’abord, s’il s’agit d’actions ou de parts de Srl, elle s’applique uniquement aux participations qui permettent au bénéficiaire d’acheter ou d’intégrer le contrôle des sociétés à travers la majorité des votes de l’assemblée ordinaire.

Aucune restriction n’est posée à l’exemption dans les sociétés de personnes, étant donné les caractéristiques particulières de ces sociétés, qui requièrent la participation de tous pour les décisions les plus importantes et où la figure de contrôle s’avère plus atténuée.

En outre, le donataire (comme l’héritier) doit s’engager expressément à poursuivre la gestion de l’entreprise ou à maintenir le contrôle de la société pendant au moins 5 ans à compter du transfert sous peine de déchéance des susdites réductions. Pour cela, le bénéficiaire doit effectuer une déclaration spéciale dans l’acte de donation. Si l’on stipule le contrat de pacte de famille, la déclaration doit être exprimée dans le contrat simultanément à la stipulation. En cas de non-respect de l’engagement pris, le donataire sera tenu au paiement des taxes ordinaires, plus une sanction administrative de 30 % de la somme non versée, plus les intérêts. Si une seule branche de l’entreprise est cédée, la sanction sera limitée à celle-ci.

Avec le retour de l’impôt sur les donations, la loi prévoit aujourd’hui que les donations indirectes soient assimilées aux donations à proprement parler. Fournir l’argent nécessaire à l’achat d’un bien équivaut à faire une donation de la même somme d’argent. L’exemple le plus fréquent est assurément l’achat d’un bien immobilier de la part de parents en faveur de leur enfant.

Mais, il y a toutefois une exception importante. Le législateur prévoit, en effet, une possibilité d’exemption de l’impôt de donation pour les libéralités liées au transfert de biens immeubles ou d’entreprises (ou constitution de droits réels sur les biens immeubles) lorsqu’on applique la taxe de registre proportionnel ou la TVA à l’acte, à condition que les parents (ou autres personnes) acceptent d’indiquer expressément dans les actes publics la provenance de l’argent employé pour l’achat des biens immobiliers en faveur du donataire. Pour que la donation indirecte soit validée, il suffit que dans l’acte d’achat le donataire déclare que le paiement de l’équivalent en argent ait bien été effectué par le donateur lui-même, sans que celui-ci ne soit tenu d’intervenir dans la stipulation de l’acte, avec des avantages évidents aussi bien sous le profil fiscal que successoral.

Rappelons toutefois que, dans un cas comme celui-ci, le bien immeuble deviendra objet de donation et, sera soumis, en tant que tel, à toutes les actions citées au préalable. On obtiendrait un résultat différent avec une donation directe de l’argent, qui ne permettrait pas de bénéficier d’allègements fiscaux, mais permettrait au donataire de considérer le bien immeuble comme un achat lui appartenant définitivement. Il est important de remarquer, enfin, qu’un récent prononcé de la Cour de Cassation a établi que les biens donnés à l’enfant par ses parents, que ce soit par donation directe ou par donation indirecte, restent la propriété personnelle et exclusive de l’acheteur et n’entrent pas dans le régime légal de la communauté entre époux.

Avv. Claudio Borio – Avv. Alessandra Campia


[1] Cf. Revue Fiscalité Européenne – Droit International des Affaires n° 163 – page 3 – « Successions : Comparaison France – Italie – Les aspects matériels et fiscaux » – Avv. Claudio Borio – Avv. Alessandra Campia.

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